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2002 [A Side] - Bullet Garden


Chapitre 2 : Les Méchants sont Occupés




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La première nuit de la croisière.




Un petit bateau traversait la mer.


"Petit", par rapport à un certain navire de croisière.


Ce vaisseau, qui penchait plutôt du côté des grands modèles pour un véhicule personnel, traçait sa route à grande vitesse.


Il n'y avait pas d'autres vaisseaux alentour.


Seule l'eau l'entourait.


Le seule chose digne d'intérêt était un ciel étoilé particulièrement magnifique qui faisait ressembler la voute stellaire à un planétarium naturel.


Le bateau continuait d'avancer vers sa destination dans ce décor, qu'on aurait presque pu confondre avec un monde dont la surface terrestre aurait été submergée sous les eaux.




Bientôt, une forme se profila au loin vers laquelle le bateau semblait se diriger.


Une sorte de lumière différente des étoiles se faisait visible à une certaine distance.


Alors que le bateau se rapprochait, les lumières grandissaient et se faisaient plus présentes, presque aussi nombreuses que sur une île.


Après s'être suffisamment rapproché pour pouvoir aisément identifier l'objet en question comme un navire de croisière, le bateau éteint ses lumières et avança silencieusement vers le navire.


Normalement, le navire aurait dû se déplacer beaucoup plus vite.


Le petit bateau estimait la trajectoire du navire et se déplaçait en amont.


Et finalement, après que le bateau se fut rapproché au point de manquer d'entrer en collision avec le navire, une ombre solitaire sortit sur le pont.


C'était une silhouette sombre.


Une personne entièrement vêtue de noir, portant une combinaison de natation, et tenant une espèce d'engin de propulsion se dirigea silencieusement vers le navire.


Telle une mine dans les profondeurs marines parfaitement obscures.


De près, il était facile de voir que le navire de croisière voyageait à une vitesse extrême.


La masse gigantesque était propulsée à travers l'océan à une vitesse allant jusqu'à 50 kilomètres par heure. Rentrer en collision avec un objet pareil aurait vite fait de transformer la victime en un petit tas de débris, et esquiver serait impossible étant donné les énormes hélices prêtes à faire du hachis de tout ce qui passait.


Cependant, l'ombre se dirigeait vers le navire sans une trace d'hésitation.


Et elle s'accrocha à la coque sans le moindre effort.


Peut-être qu'elle transportait des sortes de ventouses sur ses bras.


Bien qu'il soit impossible d'en être sûr dans de telles conditions, l'ombre levait et posait ses ventouses de façon répétée et escaladait le côté du bateau comme un insecte.


Ayant finalement grimpé une hauteur équivalente à celle d'un immeuble, l'ombre arriva au balcon d'une des cabines de l'étage inférieur.


Sur l'Entrance, les suites de classe moyenne concentrées à la proue du vaisseau étaient toutes équipées d'un balcon.


Ayant pris pied sur l'un de ces balcons, l'homme se mit silencieusement à l'oeuvre.


Il sortit un petit treuil de la poche sur son dos et l'attacha à la corde qui filait depuis sa ceinture jusqu'à la surface de l'eau.


Et alors qu'il s'apprêtait à ramener le container qui était à l'autre extrémité de la corde--


Il entendit la porte vitrée de la cabine s'ouvrir.


La personne dans la cabine eut un sursaut en voyant l'homme sur le balcon.


Celui-ci portait une tenue de combat entièrement noire le faisant ressembler à une espèce d'agent des forces spéciales. Son visage était complètement recouvert par un masque en silicone, et il portait une paire de lunettes à vision nocturne.


Et en apercevant cet homme éminemment suspicieux sur le balcon--


L'occupant de la cabine laissa échapper un soupir et parla.


"Ne me fais pas des frayeurs comme ça, Life. Tu aurais au moins pu frapper."


Ensuite, l'homme qui était couvert de la tête aux pieds, sans la moindre parcelle de peau visible, répondit froidement.


"Je suis arrivé exactement comme prévu. En fait, j'étais surpris que vous ayez laissé le balcon sans surveillance."


Il s'exprimait d'une voix calme et mécanique. A cause du masque, il était tout juste possible de déterminer que cette voix appartenait à un jeune homme.


"Si j'étais resté là aussi longtemps, les autres passagers auraient pu avoir des soupçons."


"Je crois bien que les 15 chambres entourant celle-ci sont toutes occupées par nous ou nos associés," releva froidement Life. L'occupant de la cabine sortit sur le balcon et cracha dans l'océan.


"Pas la peine de te la jouer... Death était vraiment le meilleur d'entre vous."


"Je suis d'accord qu'il était le plus talentueux de nous tous. Maintenant qu'il n'est plus là, je ne crois pas que nous allons durer encore très longtemps."


"Arrête de faire le pessimiste."


"Est-ce que ce n'est pas absurde de perdre notre arme la plus puissante avant même que l'opération n'ait démarré ? J'ai rejoint cette mission conformément aux ordres du patron, mais en toute honnêteté, nos chances de succès sont très faibles."


L'Homme d'Affaires soupira d'agacement en entendant son allié exposer les faits de façon si déplaisante.


"La ferme. Tout ce que vous avez à faire, les 'Quatre Supplices', c'est de fermer vos gueules et de faire ce qu'on vous dit. Tu as apporté le matos ?"


"Si vous tenez à le savoir, vous n'avez qu'à m'aider à récupérer le 'matos' aussi vite que possible."


"Tsss..."


L'Homme d'Affaires se mit à aider Life avec un air déconfit.




Quelques minutes plus tard, l'Homme d'Affaires ouvrit les deux containers qu'ils avaient remontés.


"... C'est parfait, Life."


Il sourit, son irritation de tout à l'heure déjà dissipée.


Dans les containers se trouvait une véritable montagne de 'Marchandise'.


Un énorme tas d'armes à feu et de grenades.


Et il y avait même des objets impossibles à reconnaître à première vue. On aurait dit que l'équipement dans ces containers allait servir à mener une guerre.


"Tu te fiches de moi ! Vous avez carrément amené un lance-roquettes ? Vous voulez couler ce bateau ou quoi ?" L'occupant de la cabine se mit à rire d'un air ébahi, en vidant le container le plus attractif.


"S'il faut en arriver là, oui."


"Wouah. Eh, t'es au courant que les méchants qui ramènent des armes pareilles finissent toujours par mourir dans l'explosion de leur hélicoptère en s'échappant, justement parce que le héros met la main sur ce genre de trucs ?"


"Et je vous demande de prendre garde à ce qu'une chose pareille ne se produise pas."


"Va dire ça à Illness."


L'homme tourna le dos à Life.


"Je vais appeler les autres ici. Illness est probablement planquée au cinéma, alors ne t'en fais pas pour elle."


"..."


"Hé, je ne sais pas quel genre de tête tu fais, mais détends toi. On est les seuls à avoir des armes à bord. Les gardes de sécurité ont, au mieux, des fusils anti-émeutes ou des carabines pour le tir au pigeon. Et avec toutes les mesures anti-terrorisme de nos jours, c'est impossible qu'un des autres passagers ait ramené des armes."


Et il éclata de rire, étant devenu un monstre capable de détruire ce navire--


"Après tout, répandre la désolation devrait être amusant ! Juste comme Alien !"


"J'ai l'impression de ressentir une pointe de remords, comme si je trichais dans un jeu vidéo." Pour la première fois, Life répondait d'un ton amusé. L'homme ricana et sortit de la pièce.


Laissé seul, Life vérifia méticuleusement le contenu du reste des containers tout en se murmurant à lui-même.


"Répandre la désolation, c'est ça...?"


Bien qu'il y ait une trace de plaisanterie dans sa voix, il était impossible de dire si le visage sous le masque souriait ou non.


"J'espère juste que nous ne serons pas vaincus par les héros durant le climax."


Le container qu'il ouvrit ensuite contenait quelque chose qui n'avait rien à voir avec des armes ou du matériel nécessaire pour détourner un bateau.


"Après tout, vous n'êtes pas Jason ou Freddy... vous êtes juste des méchants qui êtes là pour détourner ce navire."


Dans le container se trouvait une pile de masque blancs tout droit sortis d'un carnaval italien.


"Nous ne sommes que de stupides bandits qui s'emparons du futur des autres pour nos affaires, après tout. Moi aussi, d'ailleurs."


Les masques ressemblaient presque à une galerie de miroirs, réfléchissant le visage couvert de Life.


Il sortit l'un des masques et s'exprima d'un ton embarrassé.


"... Je parle trop. Même moi je me sens malade rien qu'à m'écouter."



<==>



Au même moment, à la fontaine Trevi située à l'intérieur du casino du vaisseau.



"Qu'est-ce que c'est que tout ça...?"


Firo retenait sa respiration après avoir mis les pieds dans cet endroit.


Après que la grandiose cérémonie de départ ait pris fin, colombes et feux d'artifice compris, il avait enlevé son smoking et enfilé une veste plus confortable. Firo s'était ensuite promené dans le navire avec Ennis et Czes.




Pour faire simple, ce vaisseau avait tout.


Bien que cela puisse sembler une affirmation exagérée, le vaisseau comportait tout ce que Firo aurait pu imaginer vouloir trouver à bord d'un bateau.


Rien qu'en termes de restaurants, il y avait de classieux cinq étoiles et des stands de fast food, de la nourriture italienne, chinoise, japonaise, et même des endroits qui servaient des fourmis encore vivantes et recouvertes de miel, une délicatesse australienne.


Pour ce qui était des boutiques, on aurait dit qu'un centre commercial géant avait été transplanté à bord du vaisseau. Bien que la nourriture fraîche soit malheureusement limitée, il y avait de tout, des boutiques chic aux magasins de sport, librairies, magasins de jouets, salons de coiffure, et salles d'arcade. Au centre du navire se trouvait un hall gigantesque, et les magasins s'alignaient dans une formation circulaire autour de ce point central. Le plafond du hall était fait d'acrylique claire, et des miroirs étaient utilisés durant la journée pour illuminer le hall de la lumière solaire.


Mais encore plus variés étaient les lieux de loisirs-- bien que des choses comme une grande roue ou des courses de karts manquent à l'appel, Firo se sentit inexplicablement remué quand il vit la piscine à vagues du navire.


Et après avoir vu des endroits comme les courts de tennis et les galeries de tir au pigeon, l'impression que Firo se faisait d'Entrance passa de "un château flottant" à "une ville flottante".


Pour le premier jour, il décida d'essayer de s'habituer à leur suite et de commander à dîner dans leur chambre avec le room service.


Ensuite, Ennis alla dans un salon de beauté comme le lui avait conseillé Czes, et Firo décida d'aller payer une petite visite au casino.




Ayant été le gérant d'un salon de paris, Firo fut frappé d'une certaine sensation face au casino du navire.


L'opulence. C'était la splendeur incarnée.


Bien que l'Entrance soit un vaisseau de grande classe, Firo s'était quand même attendu à ce que le casino soit un peu plus matérialiste.


Mais ses prédictions furent balayées à l'instant où il mit les pieds dans le casino.


'On se croirait à Vegas.'


Il y avait d'innombrables chandeliers accrochés au plafond. Les lampes illuminaient les jetons et les cartes, créant une atmosphère luxueuse.


Ce casino était équipé avec des tables pour les classiques comme le poker et le blackjack, ainsi que de roulettes, de bandits manchots, et de tables de baccarat.


Bien entendu, les sommes mises en jeu avaient nettement plus de valeur qu'un simple ticket d'arcade. Il s'agissait de jetons-- la toute puissante monnaie du casino.


Quand il apprit qu'il pouvait retirer des jetons avec une carte de crédit et payer en argent liquide plus tard, Firo décida d'échanger pour cent dollars de jetons, juste pour voir si cet endroit pouvait éventuellement servir de référence pour le casino de la Famille Martillo.


L'argent changeait de mains, et de minuscules tours du destin affectaient des vies entières.


Ayant déjà à une occasion arraché les ongles d'un joueur particulièrement impudent, Firo avait toujours considéré les casinos comme un microcosme de l'existence. Cependant, il ne retrouvait pas ici les frissons et l'excitation qui étaient habituellement présents dans les casinos.



"Allez ! Je mise tout sur cette main !" cria un gentleman, en poussant une quantité de jetons qui devait représenter à peu près trente fois ce que Firo avait retiré.



"Je reste sur celui-là jusqu'à ce qu'il sorte !" Une dame persistait à miser des jetons de 1000 $ sur le "00" à la table de la roulette.



"Oh, dommage ! On dirait que ce tour-ci n'est pas pour moi !" Un homme qui venait de perdre tous ses jetons dans un revirement de fortune de dernière minute sourit à son adversaire.



Bien sûr, cela ne voulait pas dire que tous les joueurs roulaient sur l'or. Il y avait bien entendu quelques clients qui misaient calmement sur des paris à 10 $. Cependant, ces personnes étaient assises inconfortablement aux coins de la salle.


'Ah, je vois.'


Firo parvint à une conclusion en observant les parieurs échanger des sourires après leur défaite.


'Pour ces gens, ces jetons ne valent pas plus que des tickets d'arcade.'


Observant ces gens profiter du plaisir des paris sans se soucier des sommes mises en jeu, Firo se sentit renforcé dans sa croyance que cette salle était belle et bien un microcosme de l'existence.


Et ainsi il décida que ça pouvait bien être l'endroit parfait pour tester l'expérience qu'il avait acquise au cours des décades passées.


Ce ne serait pas une mauvaise idée de voir combien de cette montagne d'argent il pourrait remporter simplement en pariant.


Firo sourit et s'avança.



<==>



Au même moment, sur le pont.



Bien qu'il se fasse tard, de nombreuses personnes s'entassaient encore sur le pont prés de la proue.


Certains étaient sortis pour jeter un oeil au requin gigantesque, certains pour prendre un peu d'air frais, et d'autres étaient venus admirer les étoiles.


A l'exception des secousses occasionnelles qui faisaient trembler le pont, on se serait cru à n'importe quel parc aquatique. Il y avait même des couples enlacés sur le côté.


En voyant tout ça, Bobby fit claquer sa langue nerveusement.


"Bon sang... où est passé ce Firo ?"


"Je doute de nos chances de le retrouver en se promenant au hasard dans un endroit semblable à un centre commercial gigantesque. ...Puis-je me permettre de suggérer qu'on se contente de dérober la liste des passagers ?"


"La ferme, Troy. Ton attitude prétentieuse commence vraiment à m'agacer."


Bobby rejeta la requête du garçon afro-américain derrière lui et se tourna vers le reste de son gang.


Troy, qui collectionnait les malwares appelés Trojans.


Tall, le grand.


Humpty, le gros.


Ils avaient tous des surnoms inventés par Bobby, qu'il appréciait beaucoup parce qu'ils étaient facile à dire. Bien que les possesseurs de ces surnoms ne les apprécient guère, ils faisaient comme s'ils n'avaient rien remarqué quand Bobby les appelait ainsi.


Ces garçons étaient pour l'instant légèrement perturbés par la fille qui se tenait parmi eux et qui leur adressait la parole.


"Qu'est-ce qu'il y a ? Tu cherches quelqu'un ?"


"Non, en fait... Je dois savoir quelque chose, avant qu'on parle de quoi que ce soit."


"Oui ? Quoi donc ?"


"Qui es-tu ?"


Après avoir passé plusieurs heures dans un silence forcé, les garçons et la jeune fille avaient finalement réussi à sortir discrètement du canot de sauvetage. La fille gardait la tête baissée, s'excusant encore de leur avoir imposé une promiscuité forcée pendant plusieurs heures.


"Désolée. Je suis une passagère clandestine, et je m'appelle Carnea."


"Ah, oui ! Mais tu nous l'as déjà dit !"


Le garçon cracha, avant de continuer silencieusement.


"Alors, pourquoi est-ce que tu es montée à bord ?"


"Tout comme vous... je cherche quelqu'un."


"Qui ?"


"Je suis sûre qu'il est à bord de ce bateau... vous voyez, il est comme un père pour moi..." confessa la fille, toujours tête baissée. Elle semblait être un peu introvertie, malgré sa peau bronzée.


"Comme un beau-père ? Quoi, il est parti en vacances en te laissant seule et tu es là pour le rejoindre ?"


"Non, ce n'est pas ça... Je suis là pour l'arrêter."


"L'arrêter ?"


"Oui. Il--"


Au moment où Carnea allait s'expliquer, Bobby lui couvrit la bouche avec un "Attends un instant."


"Mmphh--"


"Désolé, j'écouterais ce que tu as à dire plus tard."


Bobby fit signe aux autres de se cacher derrière un mur en surveillant le pont.


Il y avait un garçon portant un smoking à taille d'enfant, observant le requin animatronique.


Ce garçon, apparemment plus jeune que lui, semblait explorer le navire tout seul.


"C'est lui... C'est le petit frère de Firo."


"Sans le moindre doute. Je te félicite pour avoir accompli un exploit normalement hors de portée de tes capacités mentales, Bobby."


"N'est-ce pas ? Continue avec les compliments, Troy."


Le garçon ricana, sans même réaliser qu'il venait juste d'être insulté, et décida de prendre Czes en filature.


"Allez, suivons-le."


"Euh... qu'est-ce que vous allez faire à ce garçon ?" demanda nerveusement Carnea. Bobby afficha un sourire machiavélique et se tourna vers Troy, Tall et Humpty.


"Qu'est-ce que vous en pensez, les gars ?"


"Je suggérerais bien de le prendre en otage, mais mon absence de confiance en tes capacités de négociation m'incline à changer d'avis."


"D'toute façon, qu'est-ce qu'on ferait après l'avoir pris en otage ? C'est pas comme si on avait un QG où l'enfermer."


"Et- et si l'équipage nous capture avant qu'on réussisse à l'attraper ?"


Le sourire diabolique de Bobby disparut face au manque d'enthousiasme de ses amis.


Finalement, il décida de demander l'avis de Carnea.


"... Qu'est-ce que tu en penses ?"


"Euh... est-ce que vous comptez le blesser ?" demanda Carnea d'un ton hésitant. Bobby secoua négativement la tête.


"Non ! Ce n'est pas ça... Son grand frère est un sale chef mafieux. On veut juste prendre notre revanche sur lui pour ce qu'il nous a fait !"


Bobby s'exprimait avec assurance, malgré qu'il soit lui-même plutôt du mauvais côté de la loi.


"C'est une bande de racailles qui se sont emparés par la force de nos biens légitimement gagnés ! C'est pour ça qu'on va leur faire comprendre qu'on n'est pas un tas de moutons attendant de se faire tondre ! On va leur montrer qu'on est forts et suffisamment malins pour les affronter !"


Bobby vantait ses actions avec fierté, omettant complètement de mentionner le fait qu'ils avaient volé l'appareil photo d'un touriste.


"Je vois..."


Murmurant silencieusement, Carnea ne semblait pas surprise par les déclarations de Bobby.


"Où qu'on aille, c'est toujours la même chose."


Les autres garçons l'avaient entendu murmurer, sauf Bobby qui était trop excité.


Ils se concertèrent brièvement et décidèrent d'attendre de voir comment la situation allait tourner.


Et leur plus gros problème, leur chef, décida de prendre en chasse le "petit frère" de leur ennemi.


"Ne restez pas là à vous reposer, les gars ! On doit le suivre !"



<==>



"...J'ai peut-être un peu exagéré."


Ça faisait deux heures que Firo était entré dans le casino.


Le petit défi qu'il s'était lancé avait dégagé des résultats extrêmement profitables.


Bien entendu, il jouait selon les règles. Il s'agissait juste de surveiller les attitudes et les expressions de ses adversaires, en suivant une progression logique à chaque partie.


En conséquence de quoi, il se trouvait désormais en possession d'à peu près cent mille dollars en jetons.


Après observation plus approfondie, Firo avait repéré plusieurs joueurs qui étaient à la fois très riches et excellents parieurs. De telles personnes étaient des monstres pourvus d'un large soutien financier, et Firo faisait de son mieux pour les éviter.


Il cherchait ensuite ceux qui prenaient leur défaite avec le sourire, et il jouait quelques parties peu risquées contre eux en prenant soin d'alterner victoires et défaites. Il trouvait ensuite une occasion de monter les enjeux.


Après plusieurs cycles pareils, Firo se retrouva avec une montagne de jetons en sa possession.


'C'était beaucoup trop.


Maintenant que j'y pense, je suis en train de lessiver la salle entière.'


Si Firo était en charge de ce casino, ce serait le moment où il irait confronter le client ou vérifier discrètement que celui-ci était réglo.


Cependant, les employés du casino, les autres joueurs, et même ses adversaires défaits se contentaient de le féliciter pour ses victoires.


Se sentant un peu coupable, Firo hésitait entre se retirer ou aller affronter un des parieurs experts qu'il avait repéré plus tôt--


Quand un homme prit place à ses côtés.


"Vous êtes plutôt bon. Ça vous tente, un match en face-à-face ?" lui demanda l'homme qui portait une veste et un pantalon en cuir noir.


Firo pouvait dire d'un simple coup d'oeil que cet homme n'était pas de ceux qui vivaient honnêtement.


Ce n'était pas qu'une question d'apparence. L'atmosphère qui entourait cet homme lui criait presque qu'il était de la même branche que Firo. Et cet homme venait peut-être même d'un milieu encore plus redoutable ; il avait l'air sombre et acéré de gens comme Claire, Keith, ou bien même certains des dirigeants haut placés de la Famille Martillo.


Bien que Firo se demande pourquoi une telle personne se trouvait à bord d'un navire pareil, il se rappela qu'il n'était certainement pas le mieux placé pour faire une telle remarque, et décida de l'écouter.


"Pas du tout. On dirait que j'ai juste eu de la chance sur ce coup là. Je ne suis certainement pas un joueur remarquable."


Il parla de son ton de "capo" habituel et attendit la réaction de l'homme.


"Ne soyez pas si modeste. Que ce soit la chance ou le talent-- eh bien, je ne vous accuse pas d'avoir triché, mais il n'est pas difficile de reconnaître un parieur expérimenté."


"..."


"Et dire que je me baladais, en pensant que cet endroit n'était bon qu'à se divertir. Je n'aurais jamais imaginé trouver une personne comme vous par ici."


Il semblait être d'origine espagnole, ou bien peut-être d'Amérique Latine. Il avait la peau mate et des traits affinés qui lui donnaient un air de séducteur, ravageur auprès des femmes.


Alors que Firo restait accaparé par ses pensées, l'homme se mit à mélanger lui-même le paquet de cartes que le dealer lui avait remis.


Et Firo aperçut très brièvement un mouvement soudain.


Il vit l'homme glisser une carte depuis sa manche dans le paquet tout en mélangeant furieusement.


Personne d'autre n'avait rien remarqué, et le dealer n'avait pas pu le voir depuis cet angle.


L'homme continuait à mélanger le paquet avec adresse, finissant par déplacer la carte qu'il avait ajoutée au sommet du tas.


'Il est plutôt doué.'


Firo était à la fois admiratif du talent de cet homme et perplexe quand au but de cet acte.


En terme de tricherie, c'était une action plutôt inutile. Après tout, ils n'avaient même pas encore décidé d'un jeu.


Firo savait qu'un homme de ce calibre était capable de réaliser une telle manipulation sans qu'il s'en rende compte. Cependant, le fait qu'il ait laissé sa manoeuvre être repérée signifiait probablement que c'était un choix délibéré.


Bien sûr, rien de tout ça n'aurait été perceptible aux yeux d'une personne ordinaire.


'Est-ce qu'il me teste ? Pour voir si j'arrive à repérer son petit tour ?'


Firo rit amèrement et prit le paquet que l'homme avait posé sur la table.


"Eh bien, je suppose que c'est mon tour."


Il sortit ses lunettes de sa poche de veste, les mit devant ses yeux, et sourit.


Et il se mit à battre les cartes avec une expertise égalant celle de l'autre homme.


Flip flip flip. Les cartes volaient d'avant en arrière avec un bruit satisfaisant.


Et--


"Oups, excusez-moi."


L'une des cartes s'échappa du paquet en cours de mélange et tomba juste devant l'homme vêtu de noir.


Firo laissa échapper un rire contrit et reposa le paquet sur la table devant l'homme, sans même ramasser la carte qu'il avait laissée tomber.


L'homme ramassa la carte au sol, laissa échapper un sourire, et se remit à mélanger.


En un instant, la carte que Firo avait volontairement fait tomber retourna dans la manche de l'homme.


Après cette démonstration de leurs talents respectifs, l'homme se mit à sourire.


"Alors, à quoi allons-nous jouer ?"



Pour faire simple, la partie de blackjack finit sur une victoire de Firo.


Au départ, ce fut une vraie bataille mentale, les deux adversaires luttant coude à coude.


Cependant, au moment où ils avaient réellement monté les enjeux, l'homme avait stupidement obtenu un dépassement (plus de 21).


"Une défaite complète pour moi. Que dire ? Vous avez été excellent. Un effort méritoire jusqu'au bout."


"...Merci."


Bien que Firo affiche un sourire, il s'interrogeait toujours.


'J'ai beau y réfléchir, on dirait qu'il a fait exprès de perdre...'


Alors que Firo souriait pour dissimuler ses soupçons, l'homme lui tendit la main.


"Laissez-moi me présenter. Je m'appelle Angelo. Je travaille dans l'export international."


"Firo Prochainezo. Je suis gérant d'un restaurant."


Firo accepta sa poignée de main, et l'homme appelé Angelo secoua la tête d'un air gêné.


"On dirait que vos gains sur cette dernière manche dépassent la quantité de jetons en ma possession... Si ça vous va, j'aimerais vous payer un verre dans ma cabine en guise d'excuses. Qu'est-ce que vous en dites ?"


"Pas trop longtemps, alors."


Firo était sûr que c'était l'objectif de cet homme depuis le début.


'Hein...? Est-ce que je me suis déjà fait des ennemis chez les Espagnols ou les Sud-américains ?'


Firo, avec l'aide de Luck Gandor, avait déjà détruit une petite organisation au Mexique. Cependant, cela faisait déjà plus de 50 ans. Il était peu probable que quelqu'un veuille encore se venger à cette époque.


Au final, malgré toutes les questions qui lui trottaient encore dans la tête, Firo décida d'accepter l'invitation de cet inconnu, par pure curiosité. Après tout, s'il choisissait d'ignorer les intentions de cette personne, il pourrait bien finir par se faire tirer dessus ou agresser d'une quelconque manière en présence d'Ennis ou de Czes ; et il serait incapable de leur faire face s'il laissait une chose pareille se produire.


"Merci pour l'invitation. Je passerai vous rendre une petite visite."


Après avoir trouvé un employé pour échanger ses jetons contre de l'argent, Firo sortit tranquillement.




Une inquiétude persistait encore dans son esprit, au point de lui faire oublier qu'il venait de se faire suffisamment d'argent pour pouvoir rembourser leurs billets.


'Qu'est-ce que je vais faire s'il s'avère juste qu'il est gay...?'



<==>



Comme son nom le laissait entendre, la fille appelée Illness était malade.




C'était ce que tout le monde avait décidé, et c'était ce qu'elle souhaitait elle-même.


Parce qu'elle était malade.


Parce qu'elle était anormale.


Elle pensait qu'elle ne pouvait se permettre de faire ce qu'elle faisait que parce qu'elle était malade.


Et elle savait aussi qu'elle ne faisait que se bercer d'illusions.


C'est pour ça qu'elle voulait être humaine, mais ceux qui l'entouraient le lui refusaient


Peu importe ce qu'elle faisait, ils lui disaient, "T'es bizarre", "T'es pas normale", ou "T'es folle".


Et parce qu'elle savait qu'elle devait se mettre en colère en entendant ça, Illness se mettait en colère.


Mais personne n'acceptait ses actions comme 'normales'.


Elle pensait que se traiter de malade n'était qu'une façon de s'évader. Elle pensait qu'elle fuyait.


Mais en écoutant les réactions de ceux qui l'entouraient, une certaine angoisse prit racine dans son cœur.


'Et si j'étais vraiment anormale ?'


D'après les autres, la réponse était sans le moindre doute "oui".


Cependant, la répons n'était pas si évidente si on envisageait sa situation d'un point de vue plus global.




Elle se souvenait.


Elle se souvenait qu'elle avait été anormale, depuis le moment de sa naissance.


Mais cette anormalité ne lui était pas propre ; elle était dans le monde qui l'entourait.


Et c'était la raison pour laquelle ses parents l'avaient conçu.




Ses vêtements dissimulaient d'innombrables cicatrices.


Ces blessures n'étaient pas de simples bleus ou coupures ; on aurait plutôt dit qu'elle avait été "taillée" ou "découpée".


Cependant, ses parents lui disaient que c'était parfaitement juste.


Et tout le monde lui disait la même chose.


"Tu n'as rien fait de mal", lui disaient ses parents, "alors ne t'en fais pas."


Juste avant que son père lui arrache la peau du dos en souriant.




C'était un conte de fée prenant place dans les bois.


Une fable terrifiante à l'intérieur d'un manoir dans la forêt.


Une histoire remontant à bien, bien longtemps.


Un récit ancien datant d'il y a sept ans.




L'histoire commençait avec les cris d'une petite fille.


Ses cris n'étaient même pas faits de mots ; juste un hurlement primitif.


Bien qu'il lui arrive de crier pour quelque chose, aucun sens n'était accordé à ses paroles.


Elle pouvait hurler, J'ai mal Je souffre Je suis fatiguée Ça gratte Ça brûle C'estfroid froidfroidfroidfroid, mais les gens autour d'elle continuaient à prier.


Ils priaient et priaient ; pas pour elle, mais en signe d'adoration et de révérence pour sa souffrance même.


Ils priaient pour leur propre bonheur - "J'ai passé une très bonne journée aujourd'hui, merci beaucoup."


Et alors que la fille continuait à se tordre de douleur, ils continuaient à prier pour sa souffrance.


Et pourtant la fille ne leur demandait jamais, "Aidez-moi."


C'était parce qu'on lui avait appris que le fait d'aider les autres était un acte qui lui était exclusivement réservé.


La jeune fille, qui ne portait pas encore le nom de 'Illness', ne savait même pas ce que voulait dire 'Aidez-moi'.


C'est pourquoi elle n'avait jamais su les raisons derrière les choses qu'on lui infligeait.


Elle ne pouvait imaginer un monde où elle n'était pas blessée, brûlée, ou torturée.


Elle ne pouvait imaginer un monde où ses ongles n'étaient pas arrachés.


Elle ne pouvait pas imaginer un monde où sa chair n'était pas découpée.


Elle ne pouvait imaginer un monde où on ne lui ôterait pas une côte pour y inscrire des lettres avant de la remplacer dans son corps.


Qu'il existe un monde où elle n'avait pas à mourir de faim pendant deux semaines avant qu'on lui serve un repas contenant juste assez de poison pour la maintenir en vie.


Qu'il existe un monde où on ne lui ordonnerait pas de tuer une fille de son âge qui était son amie depuis un an.


La fille serait secourue par ces gens juste avant qu'Illness ne puisse la tuer.


Et ensuite ce serait à son tour d'être attachée.


Son amie, une fois remise, apparaîtrait face à elle.


Elle ne pouvait imaginer un monde où elle ne serait pas frappée par une amie qui prenait sa revanche.


Elle ne pouvait rien savoir, et n'avait jamais essayé de savoir.


Parce qu'elle avait déjà perdu la capacité de réfléchir et d'imaginer qu'un monde meilleur puisse exister.




Jusqu'à l'année de ses neuf ans - quand elle rencontra plusieurs enfants un peu plus âgés, qui s'étaient introduits dans le 'château'.


Jusqu'à ce qu'elle se lie d'amitié avec eux.


Jusqu'à ce qu'ils lui disent qu'elle était 'bizarre'.


Jusqu'à ce qu'ils lui disent qu'ils ne pourraient 'jamais pardonner' les adultes qui l'entouraient.


Jusqu'à ce qu'ils essayent de la sauver.


Jusqu'à ce qu'ils lui fassent découvrir un nouveau monde.


Jusqu'à ce qu'ils soient capturés par les adultes juste avant de pouvoir s'enfuir - et tués de sang froid.




'C'est moi qui les ai tués.


C'est parce que je leur ai dit.


Parce que j'ai pensé que je voulais faire partie d'un monde où je n'aurais pas à souffrir.


Parce que je leur ai demandé, "Aidez-moi".


C'est pour ça que ces enfants ont essayé de me sauver et sont tous morts.


Mais ils ont essayé de m'aider jusqu'au bout.


Mon père a demandé au dernier de ces enfants :



"Voilà ma fille adorée. Si tu lui arraches un oeil, je te laisserais la vie sauve."



Mais ce garçon--


Ce garçon m'a dit de m'enfuir et a attaqué mon père avec le couteau qu'il lui avait donné.


Papa tenait un pistolet.


Voilà comment son histoire a pris fin.'




Mais le conte de fée ne se terminait pas ainsi.


'Papa m'a parlé. J'étais en train de pleurer quand il a parlé.'


"Nous avons commis une terrible erreur."


Encore recouvert de l'odeur de poudre, le père s'excusa auprès de sa fille et auprès des autres.




La fille put ensuite découvrir le monde.


Elle vit un monde au-delà de la forêt ; toutes sortes de choses.


Elle regarda la télévision, lit des livres d'images, et même des mangas.


A travers la musique et les films, elle apprit tout ce qui touchait à l'espoir qui remplissait ce monde, et comment vivaient les autres enfants de son âge--


"Nous comprenons maintenant. L'ignorance adoucit la douleur."


Et elle continua à souffrir comme autrefois.


Les gens continuaient à prier, en la remerciant.


De ne pas être humaine.


D'être l'enfant d'un dieu.




Un an plus tard.


Ses parents furent abattus par un groupe de gens qui avaient soudainement attaqué le manoir.


On lui raconta plus tard que le garçon que son père avait tué était le fils d'un cadre d'une entreprise très influente. Il avait embauché les "Mask Makers" pour cette mission.


L'homme qui trouva la jeune fille, les membres et la langue attachés, pointa son arme sur elle.


"...Tu ressembles à une des victimes, mais malheureusement... Nos ordres étaient de tuer absolument toutes les personnes à l'intérieur..."


La fille ressentit un grand soulagement, en réalisant que ses parents, les autres adultes, et les autres enfants étaient tous morts.


Elle se contenta de penser qu'elle était soulagée qu'ils soient morts paisiblement, sans avoir à ressentir le genre de souffrances qu'elle avait vécue.


Même si elle savait ce que c'était que de haïr - même si elle avait été bouleversée quand le garçon avait été tué - elle ne pensait pas du mal de ces gens pour autant. La fille se croyait anormale.


"Une dernière parole ?" demanda l'homme au pistolet.


La fille répondit.


"Hé, j'ai une question. Est-ce que je suis une personne ? Ou un dieu ?"


L'homme se mit à rire.


"Je vois. Ils m'ont dit de tuer tous les gens, mais personne n'a parlé des dieux."


Et c'est ainsi qu'elle quitta le manoir.


Ainsi prit fin ce conte de fée.




Illness savait que la suite était loin d'être joyeuse.


En tant que membre de l'organisation qui s'appelait les "Mask Makers", elle apprit toutes sortes de choses afin de vivre parmi eux.


C'était une souffrance d'un genre différent de celle du manoir.


Elle s'entraîna à tuer.


Bien qu'elle soit sortie de la forêt, elle n'était toujours pas dans ce "nouveau monde" dont elle avait appris l'existence.


Cependant, elle ne souhaitait pas mourir là, aussi loin de chez elle, quand elle savait que ce qu'elle désirait était encore là, dehors.


Si elle disait qu'elle ne voulait pas tuer, elle serait elle-même tuée. Même si elle ne disait rien, la fille sentait qu'elle mourrait si elle se faisait rejeter par ces gens.




A chaque fois qu'elle se demandait si elle était malade ou non, Illness se rappelait son passé.


Et elle se répétait qu'elle était une personne anormale.


Elle croyait avec ferveur qu'elle était malade.


Elle croyait avec ferveur que des humains normaux ne se tueraient pas les uns les autres, même pour protéger leurs vies.


Elle croyait avec ferveur que, si un humain était placé dans sa situation, il n'hésiterait pas à mourir plutôt qu'à agir comme elle.


Cela parce qu'elle avait rencontré les enfants qui avaient tenté de la sauver - les enfants qui avaient été son seul espoir - et qu'elle avait assisté à leur mort.




Pour elle, ces enfants symbolisaient le monde.


Et parce que ses actions ne correspondaient pas aux actions de ces enfants, elle devait être anormale -- parce qu'elle avait choisi de vivre.


Et après s'être rappelée qu'elle était malade, Illness se mit au travail sans enthousiasme.



<==>



Entrance, salle de cinéma.




"Snif... snif..."


Comme son nom le laissait entendre, la fille appelée Illness était malade.


C'est ce que tous ceux qui la connaissaient pensaient--


Et c'est probablement ce que les gens autour d'elle en cet instant auraient dit en la voyant.


Elle se trouvait dans un gigantesque multiplexe près de la poupe du navire.


Il y avait sept salles en tout, et pour la durée de la traversée, tous les écrans étaient réservés pour les "Projections Spéciales de Shark Flight". Ils projetaient certains des films dans lesquels Claudia avait joué, ainsi que d'anciennes oeuvres de John Drox.


Illness était en train de regarder un des films les plus célèbres de Claudia--


[L'Attaque des Ampoules Tueuses]

Le Communicateur du Monde des Esprits élaboré par Thomas Alva Edison à la fin de sa vie refait surface à notre époque ! Mais le Communicateur est possédé par la terrifiante Reine des Démons ! Les inventions d'Edison sont contrôlées par des esprits maléfiques et se mettent à attaquer les humains ! Prenez garde, l'ampoule électrique veut votre mort !


Bien que ce soit évidemment un film de série B de troisième zone, le monde fut choqué d'apprendre que Claudia y incarnait un rôle majeur, celui d'une Reine des Démons enfantine.


Elle avait choisi ce rôle juste après sa performance acclamée dans le film dramatique [The Wild Dog], où elle jouait le rôle d'une fille dont les parents avaient été tués par la police.


Cependant, ses prouesses d'actrice en tant que méchante dans ce film médiocre lui apportèrent une réputation de touche-à-tout.


Dans tous les cas, ce film devint un classique reconnu. Parmi les fans hardcore de Claudia, c'était une sorte de cérémonie d'initiation de regarder ce film à plus de dix reprises.


Et durant le climax de ce film culte - alors que l'âme de Nikola Tesla renvoyait la Reine des Démons dans les profondeurs de l'Enfer, et qu'elle déclarait avoir pris en otage les spectateurs du film - Illness se mit à pleurer.


"Snif... Snif..."


Les autres spectateurs dans la salle, qui ne trouvaient rien de particulièrement émouvant à cette scène, se demandait si cette fille était malade, mais personne n'avait le courage de lui demander à cause de son apparence exubérante.


Le film prit fin, et Illness applaudit du plus fort qu'elle put alors que les crédits défilaient à l'écran.


Les spectateurs perplexes commencèrent à quitter leurs sièges les uns après les autres, mais Illness n'arrivait pas à détacher ses yeux larmoyants de l'écran.


Elle se retrouva rapidement seule, et le silence se fit dans la salle. Mais--


"Est-ce que ça va, mademoiselle ?"


Quelqu'un adressa la parole à cette fille inhabituelle.


"Snif... Qui--?"


Illness répondit par une question, en essuyant ses larmes. Le garçon qui lui faisait face sourit avant de lui répondre.


"Je m'appelle Thomas-- ou plutôt, je m'appelle Czeslaw Meyer. Vous pouvez m'appeler Czes."


Czes lui tendit un mouchoir alors qu'elle s'essuyait le visage et elle lui sourit en retour.


"Snif... merci, Czes. Mais, je ne comprends pas pourquoi tu t'es appelé Thomas avant de te corriger."


"Ah, la force de l'habitude. Ne vous en faites pas."


"?"


Illness essuya ses larmes avec le mouchoir et pencha la tête.


On aurait pu croire que l'ombre à paupières entourant ses yeux aurait été effacée, mais les larmes semblaient n'avoir eu aucun effet sur son maquillage.


En voyant ça, Czes se demanda si c'était vraiment des poches sous ses yeux, ou bien des tatouages ; mais il se retint de poser la question.


"Pourquoi est-ce que vous pleuriez ?"


La question de Czes poussa Illness à essayer de se rappeler ce qui avait déclenché cette crise de larmes.


Mais elle ne parvint pas à s'en souvenir.


Alors qu'elle commençait à chercher dans sa mémoire, elle se rappela la discussion qu'elle avait eu avec une certaine star de cinéma durant la soirée.



<==>



'Tu dois être quelqu'un de bien !'


Illness avait ressenti un mélange de gratitude et de culpabilité envers la star qui lui avait dit ceci sans la moindre hésitation.


Mais à cette allure, Claudia serait prise dans la tourmente.


La tourmente qu'ils s'apprêtaient à causer ; elle ferait partie de leur détournement marin. C'était inévitable tant qu'elle restait à bord.


'Oh non. Oh non. Oh non. Oh non. Qu'est-ce que je vais faire ? Qu'est-ce que je suis supposée faire ?'


Ce genre d'incident avait déjà eu lieu par le passé.


Cependant, elle avait toujours était arrêtée par Death ou Life, qui disait, "Tu dois agir de façon professionnelle."


'Hmph. Je ne suis pas une pro. Je suis une amateur.


Alors si je veux sauver quelqu'un, je vais les sauver. Hmph.'


Bien qu'Illness ait déjà envisagée des moyens plus radicaux, au final elle n'osait jamais défier les ordres du patron. Elle finissait toujours par considérer sa propre vie comme prioritaire, et se détestait pour ça.


Mais aujourd'hui, c'était différent.


Le patron n'était pas sur le bateau, et Death était mort. Aging était à bord de l'autre vaisseau, et Life allait bientôt arriver, mais il n'était pas encore là.


'Alors je suppose que ça va aller. Hein ?'


Et c'est de façon soudaine et impulsive que Illness - membre d'une organisation mystérieuse qui projetait de détourner le navire, et l'une des meilleures combattantes du groupe - se confessa.


"Dis, Claudia ?"


"Qu'est-ce qu'il y a ?"


Claudia souriait avec entrain, formant un contraste frappant avec la pâleur cadavérique d'Illness.


"Est-ce que tu pourrais quitter ce bateau dès maintenant ?"


"? Pourquoi ?"


"Euh... Je ne peux rien dire, mais quelque chose de mauvais pourrait arriver. Si tu ne peux pas, tu devrais au moins essayer de rester près des canots de sauvetage."


Illness prononça ces paroles choquantes pour avertir la fille qui l'avait appelée une "bonne personne" et lui avait parlé sans préjugés.


Techniquement, c'était un acte de trahison envers l'organisation, mais Illness s'en moquait.


'Hmph. Je n'ai rien dit de spécifique.'


Cette maigre excuse servait de justification légitime dans son esprit.


"Huh. Tu es une sorte de voyante ?"


Claudia pencha la tête. Illness se retourna, mal à l'aise.


Si les autres Hommes d'Affaires avaient été aux alentours, un rire moqueur était la dernière chose dont Illness aurait dû s'inquiéter, mais elle avait décidé de ne pas s'en soucier. Elle se contenta de donner un avertissement à Claudia, sans mentionner aucun détail.


"N-non, ce n'est pas ça. Mais, euh... Ah... Je ne peux rien dire. Je ne peux pas le dire, mais... bref, quelque chose de mauvais va se produire !"


Elle gesticula, et se tourna vers le requin pour faire oublier le reste.


Illness se mit ensuite à toucher et à caresser le requin, comme si elle n'avait rien dit d'important.


Une courte pause.


La star de cinéma prit sa respiration, et brisa son silence pensif.


"Illness, es-tu quelqu'un de bien ? Ou quelqu'un de mauvais ?"


Alors qu'Illness s'émerveillait du requin bougeant devant elle, Claudia fixa Illness droit dans les yeux.


"H-hein... ?"


"Est-ce que tu dis que tu vas faire quelque chose à ce bateau ?"


'Wouah, je n'ai jamais vu quelqu'un avoir un sixième sens aussi incroyable ! Je ne lui ai rien dit du tout !'


"N-non, ce n'est pas ça ! Hmph. Je ne sais absolument rien !"


Techniquement, c'était la vérité. Elle savait qu'ils s'apprêtaient à détourner le navire, mais on ne lui avait révélé aucun des détails du plan.


Ce qu'on avait dit à Illness se résumait à : "Tu es notre Plan B. Ton rôle est t'occuper de la police si ils arrivent à bord du vaisseau en utilisant des hélicoptères ou des navettes. En d'autres termes, tu n'as rien à faire si tout se passe comme prévu."


Illness avait été tellement surprise par la question de Claudia qu'elle n'arrivait pas à la regarder dans les yeux.


"Alors dis-moi juste ça. Est-ce que tu es quelqu'un de bien, ou quelqu'un de mauvais ?"


Illness était déroutée par cette question qui allait directement au coeur du sujet.


Mais sa réponse anxieuse s'avéra être encore plus directe.


"Eh bien... Si c'est méchant de tuer des gens... Je suppose que je suis une très très mauvaise personne..."


"..."


'Hein ? Est-ce j'ai dit quelque chose de mal ?'


Alors qu'Illness reprenait son calme, elle commença à réaliser la gravité de ce qu'elle venait de dire et se mit à trembler.


"A-attends. En fait, tu vois..."


C'était trop tard.


Bien qu'Illness ne sache dire comment elles en étaient arrivées là, le résultat était clair dans son esprit.


Elle venait juste de dire quelque chose de complètement anormal.


Elle venait de prouver qu'elle était un être anormal.


Et elle eut un mouvement de recul, son visage d'une pâleur maladive se tordant douloureusement.


Cependant--


"Hm..."


Claudia était une fille encore plus "anormale".


"Ce n'est pas vraiment important, que tu sois une bonne ou une mauvaise personne. Moi, j'aime les gens honnêtes."


"Hein...?"


"D'ailleurs, tu t'inquiétais pour moi, non ? Alors pour moi, tu es quelqu'un de bien ! C'est mal de tuer des gens, et je ne te pardonnerais pas si tu tuais un de mes proches, mais mon arrière-grand-père est un assassin légendaire. Et c'est même grâce à ça qu'il a fini par épouser mon arrière-grand-mère ! Alors je ne peux pas vraiment répliquer à ça, puisque je ne serais pas là s'ils ne s'étaient pas mariés."


La jeune fille aux cheveux roux rit avec assurance et déclara ses intentions à la fille plus âgée.


"Alors aie confiance ! Même si le monde entier te rejette, moi, Claudia Walken, je t'accepterai ! Puisque tu es quelqu'un de bien, je te laisserais appartenir à mon monde ! C'est décidé ! Ah, mais juste pour te prévenir, tu ne peux rien faire de mauvais à partir de maintenant. Je ne tiens pas à ce qu'un élément de mon monde soit tué par la police, après tout !"


"M-mais..."


"Si tu as besoin de tuer quelqu'un, je le tuerai à ta place. Alors ne fais rien d'imprudent."


La fille acquiesça en proclamant ces paroles qui faisaient montre d'un orgueil extrême ou d'une grande naïveté.



<==>



'C'est la première fois que quelqu'un m'a dit une chose pareille.'


Illness était venue voir ces films parce qu'elle voulait en savoir plus sur cette fille, dont les mots résonnaient encore dans son esprit.


Elle avait déjà regardé trois films, mais chacun d'eux montrait une Claudia différente.


On aurait dit que Claudia était tout ce qu'Illness n'était pas. C'était comme si elle savait tout. Elle ne faisait que prétendre - elle jouait toutes sortes de rôles. Illness le savait.


Et pourtant--


Tout ce qui touchait à cette fille à l'écran était baigné de lumière.


Qu'elle incarne une méchante ou une héroïne tragique, chacune avait sa propre couleur ; parfois claire, et parfois sombre et acérée. Peut-être que son seul défaut en tant qu'actrice était sa tendance à briller un peu trop, même dans un rôle mineur.


Le monde lui souriait.


Elle possédait tout ; influence, talent, et un avenir radieux.


Et elle avait probablement travaillé dur pour atteindre tout ça, d'ailleurs.


Alors pourquoi est-ce que Illness pleurait ?


Est-ce que c'était parce qu'une personne aussi talentueuse l'avait acceptée ?


Ou bien est-ce qu'elle pleurait en s'apitoyant sur son sort, après avoir réalisé à quel point elle était pathétique ?


Illness n'arrivait pas à trouver de réponse.


Elle ne pouvait que se rappeler la lumière derrière la fille qu'elle avait vu à l'écran et rencontré en personne. Les larmes se remirent à couler.


"Euh... Pou-pourquoi est-ce que vous pleurez, dites, mademoiselle ?"


Czes tenta précipitamment de consoler Illness, incapable de suivre le fil de ses pensées et de ses émotions.


Bien que Czes ait l'habitude de voir des gens geindre et pleurer sur leur sort, cette fille semblait être différente, d'une certaine façon.


Czes n'avait pas pour habitude de remonter le moral des inconnues pleurant au cinéma, mais cette fois il avait remarqué quelque chose et avait décidé de se rapprocher de cette fille.


"Venez, on va aller à votre cabine. Je vais vous accompagner."


La fille s'essuya les yeux et regarda Czes, en riant doucement à travers ses larmes.


"Héhé. Il te manque encore une dizaine d'années pour commencer à draguer les filles."


"Et si je réessayais dans un siècle ?"


Czes répondit au commentaire moqueur de la fille.


"Enfin, si vous êtes encore en vie."




Telles étaient les circonstances qui avaient amenées Czes à accompagner Illness jusqu'à sa cabine.


Comme celle-ci se trouvait sur le pont inférieur, à la poupe du navire, le voyage fut étonnamment long.


Czes avait fait plusieurs détours pour rallonger le chemin autant que possible, et alors qu'il descendait d'une volée de marches, ses suspicions avaient été confirmées lors du trajet.


'Je suis suivi.'


Il n'aurait pu certifier le nombre et l'apparence des gens qui le suivaient, mais il était certain qu'il y avait au moins deux personnes. Ils le suivaient de loin dans les endroits peuplés, et de plus près dans les lieux déserts.


Czes avait remarqué qu'on le suivait avant d'aller au cinéma, et il avait décidé d'utiliser la fille en pleurs comme prétexte afin d'identifier ses mystérieux poursuivants. Il pourrait se faire une bonne idée de la situation une fois arrivé à sa cabine.


Bien sûr, il aurait également pu retourner à sa propre cabine, mais il hésitait à laisser ses poursuivants connaître l'emplacement de sa cabine.


Et bien qu'il ait dû impliquer une inconnue dans ses plans, Czes était sûr que les choses se régleraient tranquillement une fois qu'il aurait réussi à identifier ceux qui le suivaient.


Le raisonnement de Czes était froid et calculateur, mais il était, au final, motivé par la peur.


Une sensation de malaise l'assaillait depuis qu'il était rentré dans cet homme en noir dans les couloirs, un peu plus tôt.


Et pour une certaine raison - pour une raison inexplicable - il se rappela du train.


Bien entendu, Czes avait pris le train et le bateau de nombreuses fois depuis. Au début le traumatisme rendait le voyage pénible, mais au fil du temps son aversion s'était dissipée.


Cette fois, c'était différent.


Bien qu'il soit dans un espace largement plus vaste que le transcontinental, et même s'il se trouvait avec les membres de sa famille en qui il avait pleine confiance, Firo et Ennis, quelque chose le dérangeait.


En termes d'atmosphère pure, c'était presque comparable, mais d'une amplitude encore supérieure, au village européen retranché qu'il avait visité l'année dernière.


'Qu'est-ce qui me fait frissonner comme ça ? On dirait presque que je viens tomber sur un Victor Talbot moqueur en pleine rue.'


Victor Talbot était un immortel avec qui Czes se sentait très mal à l'aise.


Bien que Victor n'ait causé aucun souci à Czes personnellement, il avait une tendance malencontreuse à fouiller dans le passé douloureux de Czes sans la moindre délicatesse. C'était toujours, de son point de vue très particulier, pour le plus grand bien ; mais ça n'en restait pas moins très désagréable pour Czes.


Est-ce qu'il finirait par devoir de nouveau affronter son passé ?


Ou est-ce qu'il devrait faire face à une peur véritable, comme à bord du train ?


Ou est-ce qu'il devrait affronter les deux ?


'Stop, stop. Ça ne sert à rien de se casser la tête là-dessus.


De toute façon, il faut que je fasse quelque chose au sujet de ces gens qui me suivent...'


Alors que Czes tentait de déterminer un plan d'action, Illness s'arrêta brusquement.


"Qu'est-ce qu'il y a ?"


"Ahhhh... Désolée, Czes. J'attendais juste qu'on arrive dans un endroit désert."


"H-hein ?!"


'Est-ce qu'elle va me sauter dessus ?!'


L'imagination de Czes se déchaîna de manière légèrement excessive. Qu'il doive se sentir heureux ou effrayé dépendrait de la 'sauterie' qu'elle prévoyait, mais Czes s'inquiétait de ce que ses poursuivants allaient faire pendant ce temps.


Et alors que Czes se tracassait pour ses problèmes pas tout à fait enfantins, les yeux d'Illness brillaient d'un éclat acéré.


"Désolée, Czes. On dirait que nous sommes suivis."


"Hein ?"


"Hm... ils sont tous petits. Peut-être des enfants. Quatre gamins et une fillette ? Mais certains garçons marchent comme des filles de nos jours, alors qui sait."


"Attendez, de quoi vous parlez ?" demanda Czes, confus.


Illness huma l'air et répondit, "Je ne pense pas qu'il y ait de gaz ici. Ne t'en fais pas."


Et l'instant d'après--


"Puisqu'il n'y a personne aux alentours, je vais aller les attraper."


Czes réalisa soudain quelque chose.


Il remarqua enfin qu'ils étaient bien plus bas que le pont inférieur des cabines ; ils étaient en bas des escaliers menant à ce qui ressemblait à la salle des machines.


'C'est bizarre. Je pensais que c'était moi qui dirigeait la marche.'


Au bout de l'escalier se trouvait une porte avec un écriteau indiquant, "Entrée réservée au personnel."


'Est-ce que cette fille a manipulé ces gens pour qu'ils nous suivent jusqu'ici ? Est-ce qu'elle... m'a manipulé aussi ?'


Au moment où Czes commençait à se poser ces questions, la fille bondit.


En fait, il serait plus exact de dire qu'elle s'était propulsée en l'air.


Elle avait pris appui sur la balustrade étroite et avait frappé le mur pour se propulser instantanément vers le haut des escaliers. Le temps que Czes retrouve ses esprits et grimpe les escaliers derrière elle, elle avait déjà atteint le couloir au sommet des marches.


Elle dévalait le couloir comme si elle courait le long d'un mur.


Ce genre de mouvements n'était pas humain.


C'était ce que Czes pensait, mais il se corrigea rapidement.


Ce genre de mouvements n'était pas possible pour des humains normaux. Czes connaissait personnellement des gens qui pouvaient se déplacer comme les ninjas dans les films.


Nile, Denkuro, Christopher, Charon...


Parmi la liste de noms se trouvait une personne que Czes faisait tout son possible pour oublier.


"Ahahahaha... Haha...?"


Elle sauta sur le mur et décolla dans la direction opposée.


Elle bondit sur la poignée de porte.


Elle se retourna à 180 degrés en plein saut pour toucher le plafond.


Elle se propulsa du mur opposé pour revenir dans le couloir.


Ses mouvements n'avaient aucune cohérence.


Elle sortit du couloir, par des sauts et des rebonds défiant la gravité. Czes se demanda si cette débauche de mouvements était même nécessaire. Son déplacement - non, sa trajectoire - était tellement imprévisible qu'on aurait dit qu'elle servait à perturber un adversaire visant avec une arme à feu.


Voyant ce spectacle, Czes finit par se rappeler le nom qu'il avait souhaité oublier pour de bon.


'Exactement comme...


Le... Rail Tracer...'


Un frisson lui secoua tout le corps alors qu'il murmurait le nom en question.


Le traumatisme ressurgit brusquement, paralysant son esprit. Czes secoua désespérément la tête et essaya de remettre en ordre ses pensées.


'Non, elle n'est pas le Rail Tracer ! Elle n'est pas aussi douée. Peut-être du niveau de Nile...'


Et alors qu'il commençait une tirade incohérente dans sa tête--


"...Hein ?"


Il vint finalement à l'esprit de Czes qu'Illness était peut-être plus suspicieuse qu'elle n'en avait l'air, et il entendit des cris et une voix enjouée retentir dans le couloir distant.


"Czes~. J'ai réussi à les avoir tous les trois~ !"


"...Vous vous en êtes débarrassée ?"


Et il réalisa soudain qu'il avait une fois de plus mis les pieds dans l'anormalité.



<==>



Au même instant, dans un couloir du vaisseau.




Tandis qu'Illness parcourait l'étage des cabines de seconde classe, Angelo menait Firo vers sa propre cabine, qui se trouvait à une certaine distance.


"Alors vous avez votre propre suite, M. Prochainezo ? Je suis presque jaloux."


"En fait, nous nous disions que c'était un peu trop luxueux à notre goût."


"Voilà une inquiétude des plus superflues. Peut-être qu'un échange vous intéresserait ?"


Et alors qu'ils arrivaient à la cabine, le téléphone d'Angelo se mit à sonner.


"...Excusez-moi."


Angelo s'écarta et décrocha. Il fut accueilli par une voix brusque et bourrue.


[Yo, boss Angelo. Comment qu'tu vas ? J'dois dire, j'étais plutôt choqué d'te voir au casino y'a deux secondes. Sans parler d'te voir jouer aux cartes avec l'autre type douteux et tout ça.]


"...Ah, oui. Ça fait un moment, pas vrai ?"


[Ouais, le type est là avec toi, hein ? Pas d'panique, fais semblant. Un sacré timing, j'dois dire. Bref, je t'ai laissé un petit cadeau dans ta cabine avant d'me poser au casino. T'as bien fait d'laisser la porte ouverte avant de partir, comme j'avais dit.]


"Oui. Je suis heureux que ça se passe bien. En fait, je suis à bord d'un bateau en ce moment. Est-ce que ça va aller pour la facture téléphonique ?"


Angelo continuait à parler, stoïquement. Le destinataire de ses paroles - le Demolisher - éclata de rire et ajouta une précision inutile.


[T'avais besoin d'me l'rappeler, hein ? T'y crois ça, devoir passer par un satellite alors qu'on est sur l'même putain de bateau ? Serait carrément moins cher de t'parler en face-à-face.]


"Bien sûr, j'aimerais beaucoup vous revoir."


[Et, sérieusement ? T'as même pas ramené d'costard après tout ce que j't'ai dit ? Tous ces gars au casino pensaient que t'étais un genre de star d'cinéma ! Apparemment il y a une espèce d'événement publicitaire. Et j'refuse de m'balader avec un type qui ressemble à Antonio Banderas pour que n'importe qui puisse graver ma tête dans sa mémoire.]


"En fait, je suis en train d'accueillir un invité. Je vous rappellerai plus tard."


Angelo raccrocha et laissa échapper un rire acerbe.


"Mes excuses. C'était un de mes oncles ; nous ne sommes pas en très bon termes."


"Aucun problème."


Firo répondit avec le sourire. Il y eut un instant de silence inconfortable. Angelo ouvrit sa porte, et invita son invité soupçonneux à entrer.


"Cette cabine est plutôt pas mal." s'exclama Firo en entrant dans la cabine ordinaire.


En termes de prix, elle valait à peu près 1/10e de la suite de Firo.


Cependant, cette chambre ressemblait exactement à une chambre d'hôtel de luxe en miniature. Elle avait l'air assez confortable, pour une seule personne.


Il n'y avait pas de balcon ; seule une fenêtre permettait d'apprécier la vue, mais regarder l'océan défiler depuis une cabine climatisée ne semblait pas une perspective désagréable.


Sur une table dans un coin de la pièce se trouvait une boîte en bois, contenant de l'alcool.


"Si vous voulez bien me laisser remplir les verres. J'ai fait une belle trouvaille au centre commercial il n'y a pas longtemps, vous allez voir." Angelo rit amicalement. Firo essaya de rire avec enthousiasme.


"Alors je suppose que je vais boire suffisamment pour compenser la différence."


Ils étaient assis de part et d'autre de la table ronde, et Angelo saisit la boîte.


'De l'alcool dans une boîte en bois, hein...'


L'objet rappela à Firo les souvenirs de la fois où il était devenu immortel. C'était plutôt incroyable de penser que sa curiosité pour une simple boîte en bois il y a des années de ça l'avait amené à devenir ce qu'il était.


Alors que Firo était plongé dans ses souvenirs--


"En fait, M. Prochainezo..."


Firo retourna son attention à Angelo, qui lui adressait la parole.


"C'est à propos de votre restaurant."


"Oui ?"


"...Est-ce que par hasard, il ne serait pas connu sous le nom de 'Mask Maker' ?"


'Qu'est-ce que c'est que ça ?' était la question qu'il s'apprêtait à lui poser, mais soudain --


Ses souvenirs l'en empêchèrent.


'Mask Maker'.


Normalement, ces mots s'expliquaient d'eux-même.


Quelqu'un qui fait des masques. Voilà tout.


Mais des sonnettes d'alarme se mirent à retentir quelque part dans la mémoire de Firo.


'Ces mots sont importants. Attention, attention.'


De quels souvenirs s'agissait-il ?


Était-ce l'une de ses propres expériences, acquise durant sa longue, longue vie ?


'Non.'


Était-ce l'un des souvenirs provenant de la mémoire de Szilard, qu'il avait dévoré ?


'Non.'


C'était bien plus profond que ça.


Parmi ses souvenirs, organisés comme les branches d'un arbre, ces alertes provenaient des petites branches qui divergeaient de la branche plus imposante que représentait les souvenirs de Szilard.


Les souvenirs de ceux qui avaient été dévorés par Szilard, ou bien de ceux qui avaient été dévorés par quelqu'un qui avait lui-même été dévoré par Szilard.



serial killer Italie un comte amateur de femmes

   les drogues que Père avait ordonné de créer           un homme mystérieux

les enfants se font tuer Rotten Eggs grand frère      Begg Garott



'Gretto. Ces souvenirs appartiennent à... au jeune frère de Maiza.'


Alors que Firo se concentrait pour accéder à ces souvenirs enfouis, une autre personne surgit dans son esprit--


Les mots 'Mask Maker' avaient une importance particulière pour quelqu'un d'autre dans sa mémoire.



la tragédie des jeunes enfants   deux gamins   deux filles

    Monica      Niki  une organisation criminelle       équipe de mercenaires

argent argent argent mort argent argent argent un mais plusieurs



'Lebreau.'


A l'instant où Firo réalisa à qui ces souvenirs appartenaient, il s'empêcha de se rappeler plus que ça.


'Non.


Je ne dois pas regarder dans les souvenirs de Lebreau.'


Firo ressentait une révulsion intense envers les souvenirs de Lebreau.


Peut-être était-ce parce que Lebreau avait été dévoré par un alchimiste qui avait lui-même été dévoré ensuite par Szilard ; les souvenirs et les sensations étaient moins nombreuses que chez les autres immortels. Pour Firo, ils évoquaient ses propres souvenirs datant de l'époque où il n'avait que trois ou quatre ans.


Bien que Firo ait la possibilité de se rappeler ces souvenirs plus clairement en allant chercher plus profond, il avait l'impression qu'il ferait mieux de ne pas connaître trop cet homme appelé Lebreau.


'C'est ça. Je ne peux pas m'approprier les souvenirs de ce sale type. Dans tous les cas, Lebreau est--'


C'est tout ce que Firo put obtenir avant d'être ramené à la réalité.


Bien que Firo ait été perdu dans ses pensées concernant le Mask Maker durant quelques secondes à peine, c'était plus qu'assez pour éveiller les soupçons d'Angelo.


"Alors comme ça, vous savez quelque chose."


La rapidité avec laquelle il avait battu les cartes un peu plus tôt ressemblait à un jeu d'enfants, comparée à la vitesse avec laquelle il dégaina un pistolet noir, portant des décorations rouges et dorées.


C'était une scène tout droit tirée d'un film--


Le gangster ramena stoïquement Firo à la réalité.


"Eh bien, j'apprécierais beaucoup que vous m'en disiez plus sur les 'Mask Makers'.


Sur votre patron -- et sur le salopard qui a ordonné l'élimination de notre boss."



<==>



Au même instant, sur la passerelle.




Le capitaine.


C'était un mot employé pour décrire l'être qui veillait au bon déroulement de tout ce qui se passait à bord, en tant que chef.


Cependant, contrairement aux capitaines de navires de pêche ordinaires, de ferries, ou de vaisseaux pirate, le capitaine d'un navire de croisière de luxe devait posséder toutes sortes de compétences -- de la navigation et la mécanique, au charisme nécessaire pour diriger et surveiller les innombrables employés et travailleurs sous ses ordres.


Un gigantesque complexe d'hébergement semblable à un hôtel, un centre commercial rempli de toutes sortes de boutiques, et d'innombrables centres de divertissement sous toutes les formes envisageables.


Tous ces systèmes étaient au final sous la supervision du capitaine.


En tant qu'homme qui était responsable de la sécurité de ses passagers, il devait faire figure de personnalité publique durant la croisière ; devant parfois s'accommoder de requêtes déraisonnables. Des assistants tels que le premier lieutenant ou les directeurs d'hôtels étaient là pour le soulager d'une partie de ses responsabilités.


Dans certains films, le capitaine divertissait les passagers et allait boire en leur compagnie ; cela faisait partie de sa tâche. Cependant, peu importe qu'il boive avec les passagers en quantité ou non, il ne devait jamais se soûler.


Telle était la philosophie du capitaine de l'Entrance, Falk Corner, alors qu'il veillait à ses responsabilités.


Ayant été contacté par la passerelle, il ouvrit la porte avec dignité et professionnalisme.


"Qu'est-ce qu'il y a--"


Soudain, il sentit le canon d'une arme à feu pointé dans son dos.


"Merci pour votre travail."


Le capitaine réalisa qu'il y avait une douzaine 'd'intrus' sur la passerelle, sans compter celui qui pointait une arme sur lui.


Ils étaient tous vêtus différemment, à l'exception des magnifiques masques dissimulant leurs visages, qu'on aurait cru sortis d'un carnaval italien.


Le capitaine aurait aimé croire qu'il s'agissait juste de passagers ivres venant d'un bal masqué, mais aucun événement de ce genre n'était prévu durant la traversée.


Et comme pour confirmer que ces invités n'étaient pas juste un groupe de délinquants ayant un peu trop bu, chacun des hommes masqués tenait une arme à feu dans sa main, avec l'assurance d'un professionnel. Ayant senti que ces gens ne plaisantaient pas, le capitaine se figea et parla calmement.


"On m'a dit qu'un large vaisseau non identifié avait été repéré sur le radar."


"C'est faux. Ce vaisseau n'existe que dans l'histoire que vous a raconté le premier lieutenant, sur nos ordres."


Le capitaine pouvait voir qu'un autre homme masqué pointait un pistolet sur la tête du premier lieutenant.


"Je vois. Alors je suis soulagé que nous ne risquions pas de collision."


Le capitaine Corner serra les dents pour retenir désespérément sa colère, et parla d'une voix tendue.


"La passerelle est interdite d'accès au personnel non autorisé. Je vous prierai de bien vouloir partir."


"Capitaine, je pense que vous savez très bien que nous sommes sérieux."


L'un des intrus masqués se mit à rire et s'approcha du capitaine.


"Je n'aime pas plonger les gens dans le désespoir, alors je vais vous révéler un petit secret. Nous avons commencé par prendre contrôle de la salle de communications, alors vous pourriez avoir quelques difficultés à envoyer un SOS."


"..."


"Allez, ne me regardez pas comme ça. Nous n'allons rien faire d'ostentatoire, comme de demander à tous les passagers de se rassembler dans le hall principal ou autre. En fait, nous aimerions que tous les passagers profitent de leur croisière sans avoir le moindre soupçon de ce qu'il se passe ! C'est ça ! Après tout, si nous prévenions les passagers du détournement du navire, un agent spécial qui se trouvait à bord par hasard pourrait se montrer et se mettre à jouer au héros. Et au final, on serait repérés par les médias ou capturés par la police." récita le bandit, en laissant échapper un rire frivole.


Bien sûr, aucun navire ne prenait la mer sans envisager l'éventualité d'un détournement. Et comme l'Entrance transportait de nombreuses VIP, ils avaient pris soin d'assurer la sécurité à bord.


"Maintenant, j'ai une petite question pour vous."


Le bandit écarta grand les bras comme s'il se moquait de la situation.


"Combien de personnes et d'armement pensez-vous que nous avons apporté à bord pour accomplir une telle mission ?"


"..."


"La réponse est secrète. Vous pouvez essayer d'examiner la liste des passagers, mais nous avons vraiment acheté nos billets, vous savez ? Mais laissez-moi vous donner un indice : l'un de nous a embarqué bien plus tard. Je ne vais pas vous dire comment, par contre."


Le capitaine serrait les dents pendant que le bandit faisait son petit discours, prenant de façon évidente un grand plaisir à la situation.


"Et aussi, toutes nos armes sont 100% réelles. Vous savez comment ils ont augmenté la sécurité, avec ce qui s'est passé l'an dernier ? On s'est donné beaucoup de mal pour ramener des armes lourdes à bord de ce bateau."


L'homme brandit un fusil d'assaut, comme pour prouver ses dires. Le capitaine repéra un deuxième pistolet à sa ceinture, mais renonça à tenter de s'en emparer après avoir considéré sa situation.


"Je vais aller droit au but. Nous n'avons pas placé de bombes dans la salle des machines, et nous n'avons pas attaché et ligoté les mille membres d'équipage. Pour vous dire la vérité, les seuls qui savent pour le détournement sont les gens dans cette salle et nos potes dans la salle des communications."


"Qu'est-ce que vous voulez dire ?" demanda le capitaine.


Les hommes masquées ricanèrent avant de dévoiler une certaine information.


"Non, en fait--ce que je vous dis, c'est que le plus grand atout actuellement à notre disposition, c'est le système de ventilation du navire et les bouches d'aération."


"Quoi...?"


"Ce vaisseau est incroyable, ça je vous l'accorde. Nous pouvons rester assis dans notre cabine et contrôler absolument tout, des centres de loisirs à la température des salles de stockage. Et vous avez même installé un système de ventilation programmée, aussi."


L'homme déposa son fusil et sortit une petite bouteille de sa poche.


C'était une bouteille d'eau de Cologne pour hommes. Un produit d'une marque qui était vendue à bord. Quand l'homme tourna le bouchon, un clic étrange résonna à l'intérieur de la bouteille.


"Je pense qu'une petite démonstration s'impose."


Aussitôt après avoir fini sa phrase, l'homme pulvérisa l'eau de Cologne directement sur le visage du premier lieutenant.


"Qu'est-ce que--aah...g-GAAAAAAAAHHHHHHHHHHH ! AAAAAAAHHHHHHHH ! Gah... hah... argh..."


Le premier lieutenant s'effondra au sol et se mit à convulser, en gémissant comme un insecte.


Il tremblait sur le sol comme un petit animal en train de suffoquer. Bien qu'il ne soit finalement pas mort, il mit un bon moment pour arrêter de trembler.


"Maintenant, comme vous pouvez le voir, c'est ce qui arrive quand vous ne respirez qu'une bouffée de ce produit. Deux bouffées vous donnent un taux de mortalité de 90%. Ajoutez ce produit au système de ventilation, et vous comprenez où je veux en venir, non ?"


"Salopards...!"


L'homme ignora le capitaine outragé et se retourna tranquillement.


"Laissez-moi le redire simplement. Puisque les passagers ne sont au courant de rien, vous n'avez qu'à coopérer avec nous et ils arriveront tous à bon port sans une égratignure. Mais j'espère que je n'ai pas besoin de vous préciser ce qui arrivera si nous sommes interrompus pour une raison ou une autre. Capiche ?"


"Quelle sont vos exigences ? C'est de l'argent que vous voulez ?"


"De l'argent ? Oui. Après tout, nous sommes des Hommes d'Affaires. Bien entendu, je suppose que cette mission est également une vengeance de la part de notre patron." expliqua l'homme, avent d'éclater de rire avec ses camarades.


Le capitaine, agacé par ce son, éleva courageusement la voix.


"Vous pensez que notre groupe va accepter de payer aussi facilement ?"


"Je vois ce que vous voulez dire..."


Le bandit qui avait pris le contrôle du navire se mit à claquer des doigts et pointa son index vers la tête du capitaine.


"Mais non. Ça n'irait pas. Ça n'irait pas du tout. Si nous contactons votre groupe, la police va avoir vent de ce que nous faisons. On ne peut pas faire ça. Non, non. Nous n'avons pas pour objectif de soutirer de l'argent de vos patrons. Nous avons pris le contrôle de la passerelle pour être sûr que l'autre côté nous prenne au sérieux lors des négociations.


"Qu... quoi...?" demanda le capitaine d'un ton interloqué, mais le porte-parole des bandits continuait sa tirade.


"Vous savez, je me suis toujours demandé un truc quand je regardais ce genre de films. Pourquoi est-ce que les détournements de bateaux ou d'avions finissent toujours par échouer ?"


"Parce que le mal ne l'emporte jamais."


"J'imagine que cette réponse est valable aussi, mais vous êtes quand même sacrément calme, capitaine... Bref, la bonne réponse, c'est parce que le méchant est toujours à portée du héros."


"...?"


Le capitaine resta hésitant face aux paroles étranges du bandit. L'homme pointa de la tête vers le plafond et continua calmement.


"Je dis ça juste parce que nous n'avons plus rien à cacher, mais vous voyez, l'autre parti dans notre petite négociation... c'est un de ces fameux "héros" auto-proclamés. Oh, pas une espèce de guerrier luttant pour la justice, mais il a quelques pouvoirs en réserve. Le genre de types qui se sacrifieraient pour sauver des otages. Dans tous les cas, seul le patron sait qui ils sont vraiment."


L'homme bavardait, tout en gesticulant avec emphase, et se tourna pour faire face au capitaine.


"Mais, vous voyez, c'est impossible à moins d'utiliser ces deux vaisseaux soeurs."


"Ce n'est pas possible..."


"Ça l'est. Si nous prenons les deux vaisseaux soeurs en otage..."


L'homme fit une pause théâtrale avant de reprendre, comme s'il profitait de la performance.


"Si nous prenons les deux navires en otage, il n'y a rien que le héros puisse faire, puisqu'il est coincé sur son navire, n'est-ce pas ?"


Les preneurs d'otage se mirent à rire. Les yeux de leur porte-parole brillèrent alors que sa voix se faisait plus menaçante.


"Maintenant... j'ai une question très importante pour vous, capitaine."


"Qu-qu'est ce que c'est ?"


Le bandit regarda le capitaine droit dans les yeux, tous deux parfaitement sérieux.


"Seagal (Le Cuisinier Invincible) et Van Damme (L'Ancien Universal Soldier) ne se trouvent pas à bord de ce navire, n'est-ce pas ?"



<==>



La cabine de Firo.




'Où est passé Firo ?'


Ennis était revenue après que son soin de la peau au salon de beauté se soit terminé. Toutefois, son visage était crispé par l'inquiétude, d'une façon qui seyait peu à sa peau sublime.


'Czes n'est pas revenu non plus.'


Aujourd'hui était la première fois qu'Ennis s'était rendue dans un salon de beauté. Comme elle était une homonculus, l'entretien de sa peau ou les soucis de santé n'étaient guère importants pour elle. Cependant, Ennis était un peu curieuse de voir si les traitements humains feraient effet de façon similaire sur un homonculus.


Peut-être que les esthéticiennes professionnelles remarqueraient les légères différences dans la constitution de son épiderme et lui diraient, "Vous n'êtes pas humaine, vous ?". Mais les inquiétudes d'Ennis ne s'étaient pas concrétisées. La masseuse lui avait juste offert des compliments tels que, "Vous avez une peau tellement belle ! J'en suis jalouse." Ils avaient passé les trois heures suivantes à accomplir leur magie sur elle.


Bien qu'Ennis ne puisse dire si le traitement avait causé des changements plus profonds, sa peau était éclatante et sa coiffure avait l'air plus brillante que d'habitude.


'Est-ce que je n'ai pas l'air bizarre ?'


Parce que sa peau avait l'air complètement différente, Ennis avait décidé de demander l'avis de Firo et de Czes. Mais ils n'étaient pas encore revenus à la cabine.


Czes leur avait dit, "Cette nuit, je vais aller regarder quelques films au cinéma, ou autre chose", et Firo avait dit qu'il allait visiter le casino.


Ennis était donc passé par le casino en chemin, mais Firo n'était nulle part dans la salle. Elle avait attendu un moment après être arrivée à la cabine, mais ni Firo ni Czes ne l'avait contacté.


'Je ferais mieux d'aller les chercher...' pensa Ennis. Mais au moment où elle se leva, elle entendit la carte clé biper à l'entrée, et le son de la porte qui s'ouvre un instant plus tard.


Voyant Firo à l'entrée, Ennis laissa échapper un soupir de soulagement -- et perdit immédiatement son souffle en voyant les impacts de balles qui parsemaient ses vêtements.


"Qu'est-ce qui s'est passé ?!"


"Ah... non, en fait, c'est réglé, alors ne t'en fais pas. Pour l'instant."


"Mais qu'est-ce que..."


"Ah, tu sais. J'ai l'habitude maintenant."


Firo rit amèrement, et sortit ses lunettes tordues de sa poche de veste.


"Oh... oh. Elles avaient coûté cher..."


Le chef de famille haussa les épaules, d'un air abattu.


"C'est vraiment pas évident de dissiper un malentendu, tu sais ?"


Alors qu'il se posait dans le canapé, la ligne téléphonique interne se mit à sonner. Ennis décrocha rapidement le combiné et parla brièvement à son interlocuteur.


"Firo ?"


"Qu'est-ce ce qu'il y a ?"


"C'est Czes... Il dit qu'il va rester chez quelqu'un d'autre ce soir, alors pas besoin de s'en faire pour lui..."


"Quelqu'un d'autre ?"


Firo réfléchit un moment, se demandant de qui il pouvait s'agir.


Peut-être qu'il avait été attrapé par Claudia ou Charon, ou peut-être que Czes était tombé sur un vieil ami dont ils ne savaient rien. Czes avait vécu très longtemps ; ç'aurait été logique qu'il connaisse quelqu'un dont il ne leur avait jamais parlé.


"Ahh... Et dire que c'était censé être des vacances en famille", marmonna Firo, avant de se rappeler brusquement ce que Czes lui avait dit alors qu'ils embarquaient.



"Une fois qu'on sera à bord, je vous éviterai autant que possible pour ne pas vous déranger."


"J'irai voir un film au cinéma ou autre chose la nuit."



Firo manqua perdre ses esprits sous le choc et commença à respirer abondamment, le visage rouge.


"Firo ! Ça ne va pas ? Laisse-moi voir..."


Ennis se rapprocha de lui, inquiète, mais ça ne fit qu'empirer les choses pour Firo. Alors que son visage devenait de plus en plus rouge, Ennis commença à s'inquiéter de plus en plus.


"Ton visage est complètement rouge ! Même les immortels peuvent avoir de la fièvre pendant un moment s'ils sont empoisonnés ou infectés..."


"N-non, ce n'est pas ça !"


Firo nia rapidement d'un signe de tête et essaya désespérément de se calmer.


Ennis pencha la tête d'un air confus, mais voyant que son mari retrouvait son calme, son inquiétude sembla se dissiper également.


Et Firo lui parla.


"Maintenant que j'y pense, ton visage a l'air plus... doux... et tes bras aussi, d'ailleurs." dit-il, en fixant son visage.


"Ah !"


Cette fois, il semblait qu'Ennis soit celle qui soit surprise. Elle détourna le regard nerveusement.


"Em... est-ce que c'est... bizarre ?"


"Non. Tu es très belle."


Firo se contenta de donner son avis sincère. Bien qu'il ait couru un péril mortel il y a peu, Firo avait l'impression d'avoir été sauvé par la simple vue d'Ennis, avec sa peau et sa coiffure éclatante, et son expression timide.


"Tu... le penses vraiment ?"


Alors que les joues d'Ennis se mettaient à prendre une teinte rose, Firo se dit, 'Elle est encore plus mignonne quand elle rougit.' Il décida que ça lui suffisait.


im13


Et le premier jour pour le mari timide et sa femme innocente se termina sur ce qu'un observateur extérieur aurait pu considérer comme absolument rien.




Sans même réaliser tout ce qui pouvait avoir lieu sous la surface, en silence.



--> Interlude

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