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Mon nom est Copycat.
Je ne suis qu'un simple imitateur.
Oh non, j'ai raté mon coup, j'ai raté mon coup. J'ai fait une bêtise à l'instant critique.
On dirait que j'étais trop excité. On dirait que je n'ai pas pu contenir ma joie.
Si seulement, si seulement tout s'était déroulé comme prévu--ils auraient tous été condamnés.
Il n'y aurait pas dû avoir d'espoir à bord de ces navires. Ah, dommage, dommage.
J'en ai assez d'être Copycat.
C'est pour ça que, pour la première fois depuis tout ce temps ; je vais sortir sous mon vrai jour.
Je vais me promener dans ce monde si charmant, si charmant.
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Plusieurs jours après, quelque part en pleine mer.
"Gahaha ! Franchement, j'avais jamais vu un clown pareil ! Dire que je t'ai filé un bon coup de kukri dans le feu de l'action ; t'étais littéralement tranché en deux ! Ça t'apprendra à vouloir protéger ces sales mômes avec leurs bandeaux."
"Mais si je n'avais rien fait, je suis presque sûr que je n'aurais pas pu les voir sourire."
"Bah, t'en fais pas pour ça. Je voulais juste les faire sursauter un peu."
Interrompant cette conversation d'une gaieté plutôt inadéquate, l'otage baissa soudain la voix.
"Tiens d'ailleurs, Luchino... je peux vous parler une seconde ?"
Elmer n'était pas attaché, mais Aging le surveillait de près. Il appela Luchino, qui s'était assis un peu plus loin. Le garçon avait esquivé leur captif durant ces derniers jours, mais il semblait avoir finalement mis suffisamment d'ordre dans ses pensées pour pouvoir faire face à Elmer avec le visage assuré du Président ; bien sûr, il se contenta de l'observer silencieusement. Elmer accepta le regard du garçon comme une réponse positive et s'adressa à lui d'un ton détendu.
"Je me demandais juste, pourquoi vous détestez tellement Huey ?"
"..."
Le Rookie le fixa d'un air furieux, conservant le silence. Mais l'expression optimiste d'Elmer restait d'un calme imperturbable, le forçant à détourner le regard et à répondre stoïquement.
"...C'est une vengeance."
"Quelle vengeance ?"
"Une vengeance pour moi... et pour les sentiments hérités de mon ancêtre."
"Si ce n'est pas trop demander, vous pouvez peut-être m'en parler ?"
La question d'Elmer était des plus impolies, comme toujours ; le Rookie se sentait nerveux, mais il décida de répondre, répétant ses motivations afin d'affirmer sa résolution.
"Je suis sûr que vous le savez déjà... Mon ancêtre, Huey Laforet... il a tué sa femme, Monica Campanella... mon autre ancêtre."
"..."
"Et depuis ce temps, notre famille s'est passé le nom des 'Mask Makers' et ce désir de revanche à travers les générations. Ça vous paraît stupide ? Pour vous, continuer cette lignée dans le but ultime de venger un ancêtre que nous n'avons jamais connu, c'est parfaitement ridicule, hein ?"
"...Non, je ne vous dirai pas d'arrêter si c'est ce qui vous rend heureux, mais..."
Pour une raison inconnue, Elmer hésitait à continuer. Le Rookie l'observa avec suspicion.
"Qu'est-ce qu'il y a ? Vous avez quelque chose à dire ?"
"Non, c'est juste... Oui, je vois. Voilà comment on vous a raconté l'histoire.
Je comprends... C'est... Il est exactement du genre à agir ainsi."
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Le même jour, dans un centre du FBI aux États-Unis.
"Je le demande. Pourquoi avons-nous été arrêtés ?"
"C'est vous qui me demandez des réponses, vous les bombes à retardement ?"
L'homme aux lunettes répondit, d'un ton encore plus agacé que Nile. L'immortel qui occupait le poste de directeur adjoint de la Section d'Investigation Spéciale du FBI - Victor Talbot - poursuivit, une veine nerveuse palpitant sur le front.
"Tu réalises quand même que tout ça est de ta faute, Nile ? C'est bien toi qui t'es amusé à massacrer tous ces gens, non ?"
"Je regrette amèrement. Et pourtant, quelle déception. Cette femme titanesque que j'ai rencontré durant l'élaboration du plan... Je comptais l'affronter en combat singulier après avoir vaincu ces gens en rouge et noir, mais ils se sont enfuis en bateau avant que j'en ai eu l'occasion."
"Tu oses appeler ça des remords ?! Argh, vous autres... Vous ne pouvez pas me foutre la paix une journée, non ?! Alors quoi ? Vous voulez me faire mourir de surmenage, pour que je revive, me faire encore mourir de surmenage, pour que je revive, me faire mourir de surmenage une fois de plus, pour que je revive encore une fois et que je crève de surmenage encore et toujours ? Ces morveux en blanc que vous nous avez ramenés étaient tellement traumatisés que nos psychologues se crèvent la santé avec eux, mais ce n'est tout de même pas de leur faute, hein ? Ce ne sont que des victimes innocentes ! Mais bien sûr ! Bref, jusqu'à ce qu'on chope les coupables, je vais devoir me défouler sur cet abruti d'Huey !"
"Reprenez votre calme, Maître Victor. Dans tous les cas, avez-vous pu obtenir des informations sur l'identité des assaillants ?"
Victor semblait avoir retrouvé la maîtrise de soi grâce à Denkuro. Il secoua négativement la tête.
"Honnêtement, tout ce que je peux dire c'est qu'on est encore sur le coup. Ces Mask Makers ne sont qu'un tas de mercenaires, mais ces tarés de religieux sont vraiment... enfin bref, ils ont tous disparu ; ceux qu'on avait capturés, et même les corps. Tout ce qui nous reste, c'est des tâches de sang et des morceaux de chair. Bien sûr, on s'occupe de les retrouver, mais j'espère pour lui que cet abruti d'Elmer a beaucoup de chance."
"Tiens, maintenant que j'y pense... c'est vrai que Czes était à bord de l'autre vaisseau ?" demanda Sylvie.
"Hm ? Ah... ce petit salaud. Il est parti en vacances avec sa famille, un couple de nouveaux immortels. C'est vraiment ridicule," répondit Victor, faisant fi de ce détail.
"C'est un soulagement d'entendre qu'il se porte bien. Se trouveraient-ils eux aussi en cet endroit ?"
"Non, ah, en fait... hm."
Victor s'interrompit. Les trois autres le fixaient du regard, et il secoua la tête en signe d'abandon.
"...En ce moment... ils sont au Japon."
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Le même jour, dans une attraction touristique à Kyoto, au Japon.
Ils grimpaient une longue volée de marches entourée d'échoppes de souvenirs. Très vite, un bâtiment peint de couleurs vives - mais qui s'accordait avec élégance au paysage - commença à apparaître. Le son d'une flûte résonnait quelque part au loin, et convenait merveilleusement bien à la scène. Leur promenade était d'une détente idéale. Mais--
"...Argh, je n'en peux plus. Il faut vraiment que je vous avoue quelque chose."
Alors qu'ils finissaient d'escalader les marches, Firo - qui avait gardé une expression morose durant l'ascension - se retourna pour faire face à Ennis et Czes.
"C'est un peu tard pour des excuses, mais... je suis désolé. J'ai complètement ruiné nos vacances," confessa Firo. Ennis et Czes lui répondirent avec un sourire.
"Pas du tout, Firo. Bien sûr il y eu quelques soucis, mais c'est grâce à toi qu'on a pu arriver au Japon sains et saufs."
"Ennis a raison, frangin. On a peut-être dû supporter un sermon de dix heures de Victor, mais ça vaut mieux que de traverser le Pacifique à la nage !"
Le couple Prochainezo et leur frère adoptif avaient été mêlés à un détournement de navire ; au final, il étaient arrivés sans problèmes au Japon. Et maintenant ils se baladaient dans une des destinations touristiques majeures du pays.
L'incident en question était d'un ampleur internationale, et normalement ils n'auraient jamais dû être autorisés à débarquer pour poursuivre leurs vacances sitôt arrivés au port. Mais Claudia leur avait filé un coup de main et avait demandé à John Drox d'inclure Firo et sa famille comme membres de l'équipe de tournage ; résultat, ils arrivèrent au Japon avec Claudia dans un vol spécial. Cela dit, ils durent quand même aller déposer leur témoignage aux autorités japonaises ; ce qui les força à revoir Victor, venu expliquer la situation, pour la première fois depuis un bon moment.
"Z'avez bien de la chance. Normalement personne n'aurait droit à des privilèges pareils. Partir au Japon quelques jours après avoir affronté un tas de bandits ? On sent la fin qui se rapproche, moi je vous le dis. Ouais ! La fin est proche ! J'aurais presque envie que ce monde prenne fin dès maintenant !"
"Est-ce que ce n'est pas votre boulot de sauver le monde ?"
"La ferme, sale racaille criminelle ! Bon sang ! Ce studio a beaucoup d'influence, même dans notre domaine... Puis bon, c'est aussi parce que miraculeusement, il n'y avait aucune victime sur l'Entrance, pas comme sur l'Exit. Mais là on est coincé, à vérifier tous ceux mêlés de près ou de loin à l'incident. Ça, vous pouvez remercier le groupe McDonnell !"
"Je pensais que McDonnell était une compagnie aérienne, pas un distributeur de films. Même l'industrie du cinéma vous met la pression ?"
"Tout juste. Et la compagnie aérienne, c'est McDunnel--hé ! Minute, là ! Le FBI ne cède pas aux influences extérieures ! Enfin, le FBI ne mange pas de ce pain là, qu'ils disent, mais comme notre section s'occupe des cas impliquant les immortels, plusieurs grands groupes nous rendent des services pour garder tout ça confidentiel... tch. Pourquoi je vous raconte tout ça ? Franchement, on pourrait s'entendre si vous preniez un nouveau départ, mais une racaille comme vous ? Qui part tranquillement en croisière ? Vous n'avez vraiment aucun respect pour--"
Au final, Firo et Czes avait dû subir les récriminations de Victor pendant tout l'après-midi. Ils avaient commencé à piquer du nez à partir de la moitié, mais Victor avait poursuivi ses tirades passionnées, passant outre l'attention déficitaire de son public.
Malgré tout, même s'ils étaient potentiellement observé par des agents de Victor, la famille pouvaient maintenant profiter de leurs vacances au Japon. Il semblait y avoir eu plusieurs victimes à bord de l'Exit, et Firo craignait de se laisser écraser par la culpabilité ; mais il s'était résolu à sortir faire un peu de tourisme, afin d'épargner à Ennis et Czes le même sentiment.
Son ami photographe était resté à l'hôtel préparer avec impatience son appareil, leur annonçant "Je vais vider ma pellicule ce soir !". Firo aurait aimé qu'il prenne quelques photos d'eux, mais il semblait s'intéresser nettement plus aux paysages du coin. Ce photographe japonais avait offert de faire le guide touristique pour eux durant leur voyage. Coïncidence incroyable, il avait des amis qui s'étaient trouvés à bord de l'Exit ; la veille encore, il leur rendait visite à l'hôpital. Un de ces amis était tombé dans les escaliers en allant s'assurer que son aimée se porte bien. Les trois étrangers avaient laissé ces amis à leurs retrouvailles et étaient partis découvrir l'endroit.
Tous les trois se débrouillaient très bien en japonais. Pour Czes, c'était déjà la cinquième fois qu'il venait à Kyoto. Ils n'avaient aucune difficulté à se promener seuls. C'est à ce moment que Firo s'était lancé dans de plates excuses, tandis que Czes et Ennis essayaient de le rassurer--
Mais Firo secoua la tête d'un air désolé.
"Non... tout est de ma faute. Depuis tout ce temps, j'avais peur des vieux souvenirs de Szilard. J'étais tellement sûr d'arriver à vous protéger tous les deux sans devoir recourir à ces savoirs maudits. Si seulement j'avais fouillé dans mes souvenirs un peu plus tôt... Je suis certain qu'on aurait pu régler la situation beaucoup plus vite. ...Mais tout va changer maintenant."
"Firo..."
Ennis avait l'air de s'inquiéter pour lui, mais Firo approuva résolument.
"Je vous le promets. Je resterai toujours moi-même. Même si je possède les souvenirs de Szilard, je ne deviendrai jamais comme ce vieux salaud--"
Ennis écoutait Firo avec entrain. Czes marmonna, "Grands dieux, en voilà un programme," en tournant le bord de son chapeau entre ses doigts. Mais soudain--
"Et même si je possède les souvenirs de Lebreau, je ne deviendrai jamais comme lui."
Au moment où Czes entendit ces mots, il leva la tête d'un air interrogateur.
"Hein ? Que... Qu'est-ce que t'as dit ?"
"Hm... Ah, euh. En fait, j'ai aussi les souvenirs de Lebreau, qui s'est fait dévorer par un autre alchimiste, un de ceux dévorés par Szilard..."
"Mais voyons, qu'est-ce que tu raconte, frangin ?"
L'air confus de Czes prit Firo par surprise. Et--
"C'est juste ça, Lebreau s'est fait dévorer par un autre type, et ensuite ce type-là s'est fait dévorer par Szilard--"
"Ahaha ! Quelle bonne blague, Firo."
Le sourire innocent de Czes commençait à inquiéter Firo.
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Dans le centre du FBI aux États-Unis.
"Alors comme ça... Czes part en vacances, et nous on finit en détention..."
Victor détourna les yeux du regard glacial de Sylvie, et s'adressa à Denkuro afin de détourner le sujet de la conversation.
"Enfin bref--ça fait des années qu'on ne s'était pas vu, Denkuro ! Alors ? J'ai entendu dire que t'étais tombé à la mer, tout au nord, et que tu t'étais changé en Mr Freeze !"
"...Hm... Alors même vous avez eu vent des rumeurs, Maître Victor..."
Denkuro fronça légèrement les sourcils et réfléchit un moment--
"Il semblerait qu'il n'y ait guère le choix. Celui-ci le déplore, mais il serait sans doute souhaitable de faire savoir la vérité plutôt que de risquer l'humiliation."
"Quoi ?"
Il n'y avait pas que Victor ; même Nile et Sylvie le fixaient d'un air intrigué.
"Celui-ci n'est pas tombé suite à une maladresse. Celui-ci a été victime d'un coup retors ; fait prisonnier dans un coffre durant son sommeil, et lâché dans une crevasse. Après tout, celui-ci se souvient encore très clairement des derniers moment ayant précédé ce repos prolongé."
"Qui a pu faire une chose pareille ? Ne me dis pas que c'est ce vieux Szilard ? Non, il t'aurait dévoré pendant ton sommeil, pas jeté dans une crevasse."
Victor était avide d'en savoir plus, mais Denkuro s'interrompit un moment--et reprit la parole, finalement décidé.
"Celui-ci a été pris au piège d'un individu que vous connaissez tous très bien..."
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En mer.
"Je ne pense pas que vous me croirez, mais je vais vous le dire quand même."
"Non, je ne pense pas vous croire moi non plus, mais allez-y toujours," répondit sarcastiquement le Rookie. Elmer inspira et commença calmement à exposer la vérité.
"Ce n'est pas Huey qui a tué Monica. Á l'époque, il n'était pas encore du genre à s'approprier le monde pour ses expériences. ...Non, j'imagine que c'est pour cette raison qu'Huey est devenu celui qu'il est aujourd'hui."
"..."
"Monica n'a pas été tuée par Huey, ni par moi... mais par un autre alchimiste ; à l'époque il était considéré comme un génie qui rivalisait même avec Huey..."
"...Qui est-ce ?"
Le Rookie l'interrogea d'un ton amer. Elmer, lentement, révéla un certain nom.
"Lebreau..."
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Un coin à touristes de Kyoto.
"Haha ! Vraiment, Firo, t'es trop marrant !"
Et Czes s'enfuit en riant après ces mots.
"Hé, hé ! Czes ! Attends !"
"Je vous retrouverai à l'hôtel ! Profitez un peu de votre balade en amoureux, okay ?"
Czes continuait à courir, sans même écouter ce que Firo lui criait.
Il courait.
Et courait.
Courait.
Depuis combien de temps courait-il ? Il n'entendait plus la voix de Firo le poursuivant. La frêle carrure de Czes se frayait un chemin dans la foule de touristes en courant vers un endroit désert, sous le soleil accablant.
"Ahaha. Sérieusement."
Czes s'aperçut qu'il se parlait tout seul.
"Ce Firo, qu-quel sacré blagueur, quand même..."
Czes, qui avait finalement atteint un lieu tranquille, à l'écart des touristes, s'arrêta pour souffler un peu et regarda devant lui. Il se trouvait au sommet des marches qui menaient à un temple en contrebas. Czes s'assit sur la marche supérieure et commença à reprendre son souffle. Mais sa respiration restait aussi paniquée qu'avant ; un sourire enfantin recouvrait son visage, mais son front dégoulinait de sueur.
"Ahaha... hahaha... pourquoi est-ce que Firo... mentirait comme..."
Sa respiration était agitée. Il s'exprimait d'un ton léger, mais son sourire s'était effacé sans qu'il s'en rende compte. Avec l'air d'un jeune gamin poursuivi par le croquemitaine, Czes se rappelait cet incident traumatisant de son passé.
'C'est l'inconnu qui te terrifie.'
Les paroles que le monstre rouge lui avaient dites dans le train.
Le train où il avait été victime d'une souffrance d'une intensité plus insoutenable qu'il n'en avait jamais ressenti, et d'une peur dont le souvenir ne le quitterait jamais. Czes était de nouveau la proie à cette sensation de malaise qui l'avait assailli à bord du navire, mais encore plus dérangeante qu'auparavant.
'C'est ça. C'est l'inconnu. Je ne vois pas pourquoi Firo mentirait comme ça.'
Quelque chose était étrange dans ce qu'avait dit Firo. Et ce simple fait donnait à Czes de terribles spasmes et lui filait la nausée. Il réalisait que son sourire n'était qu'une tentative désespérée de nier ses symptômes, mais il était à bout. Et alors qu'il souffrait d'une terreur à lui retourner les boyaux--
La voix appela Czes depuis le bas des marches.
"Tout va bien, Czes ?"
Le son de la flûte disparut. Le vent cessa de souffler. L'homme souriait doucement à Czes, comme s'il attendait cet instant précis pour faire son apparition.
Et Czes sentit son esprit se figer.
"...Hein...?"
Sa voix était presque inaudible. Czes était captivé par l'homme qui s'avançait vers lui, et laissa échapper un son qui tirait vaguement du gargarisme ou du simple souffle coupé.
L'homme avait l'air un peu embarrassé en s'adressant à son vieil ami, son ancien camarade alchimiste.
"Ça fait longtemps, Czes."
Ses lèvres fines convenaient parfaitement à son sourire malicieux. Si un certain Smile Junkie avait été là pour assister à la scène, il aurait été heureux de voir un sourire débordant d'une joie aussi exultante. Mais le son qui s'échappa des lèvres de Czes était encore plus faible que celui du vol d'un moustique.
"non... ce n'est pas... pas possible."
Le passé qui hantait le garçon ressurgit devant lui en cet instant précis ; au moment même où il prononça le nom de cet homme.
"Fer...met..."
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"Celui-ci a été pris au piège d'un individu que vous connaissez tous très bien..."
Denkuro prit sa décision et révéla le nom en question.
"...Maître Fermet."
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"Lebreau... Lebreau Fermet Viralesque..."
Elmer récita lentement le nom complet de cet homme.
De façon surprenante, son sourire éternel était pour une fois très légèrement assombri. Il commença à murmurer lentement, le regard distant.
"Je n'ai jamais eu l'occasion de lier connaissance avec lui ; nous n'avons jamais vraiment discuté, et puis il me méprise."
Elmer se rappela sa conversation avec Czes sur le toit d'un château d'Europe de l'est l'année dernière.
Elmer n'avait rencontré cet homme qu'occasionnellement, peut-être une fois tous les cent ans, aussi il ne s souvenait pas aussi bien de lui que d'Huey ou de Czes. Mais il était sûr et certain que Fermet était en charge de Czes.
"Il essayait toujours de dissimuler sa vraie nature... Alors peu importe ce qu'il faisait, personne ne lui prêtait grande attention."
Bien qu'il n'ait plus que de vagues souvenirs de cet homme, dont il n'avait pas entendu parler depuis des dizaines d'années, Elmer rassembla ses pensées et se souvint peu à peu de ce que Huey lui avait dit à son sujet.
"La dernière fois que j'ai vu Fermet, ça devait être en 1931 ou 1932... Maintenant que j'y pense, c'est bizarre... Quand est-ce que Czes l'a dévoré ?"
Il se souvenait de la confession de Czes sur le toit. L'histoire tragique de comment, après des années de torture, Czes avait fini par dévorer Fermet.
'C'est vrai que c'était quelqu'un de mauvais, mais je n'aurais jamais cru qu'il puisse faire des choses pareilles à Czes ; ils formaient presque une famille...
Il avait bien l'air de se comporter un peu particulièrement avec Czes, mais... j'ai toujours pensé qu'il était le genre de personne vraiment sinistre, qui se montrait plus subtil quand il s'agissait de tourmenter les autres, surtout Czes...'
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Quelque part à Kyoto.
"Ce... C'est pas possible..."
'Je dois rêver.'
"Pas possible..."
'C'est juste un cauchemar.'
L'homme s'avançant vers le garçon pris de tremblements sourit doucement et parla d'un ton nostalgique.
"On dirait que tu te porte bien. Est-ce que tu as enfin cessé cette sale habitude de manger de la neige, tu sais, tu la saupoudrais avec du sucre ?"
"Ah... uaahh... ah..."
"Fais attention, la neige contient toute la poussière de l'atmosphère ; et ces temps-ci, on y trouve toutes sortes de polluants en plus... tu vas te rendre malade."
Soudain--
Le monde commença à tourner autour de Czes. Avant qu'il s'en rende compte, il avait cessé de respirer, et fixait l'homme qui grimpait les marches dans sa direction. Techniquement, c'était Czes qui l'observait de haut, mais à voir sa tête, on aurait dit tout le contraire.
Les yeux de l'homme étaient dissimulées par ses longues mèches ; Czes ne pouvait pas distinguer la couleur ou la forme de ses yeux. Cet homme avait l'air tellement mystérieux que ça ne l'aurait même pas surpris de découvrir qu'il cachait un troisième œil derrière ces mèches de cheveux. Mais Czes connaissait ce visage. Ses cheveux étaient plus courts qu'autrefois, mais ce visage lui était bien trop familier.
"Non... pas moyen..."
Alors que Czes répétait ces mots avec le cœur brisé - le malaise qui l'envahissait depuis qu'il avait mis les pieds à bord du navire devenait étouffant--
"Ne sois pas si froid, Czes."
Et ce malaise éclata comme une bombe lorsque l'homme poursuivit.
"Ne me dis pas... que tu m'ignores ?"
"Ah..."
Czes cria doucement et se jeta en arrière. Mais ses jambes refusaient de bouger. Elles restaient plantées là. L'homme se tenait maintenant juste devant lui ; il s'arrêta.
"Czes... mon petit Czes, toujours aussi malin. Je parie que je sais ce que tu es en train de te dire ! 'Comment ce type peut-il être toujours vivant?'."
"...Ah... aaaaahhhhh..."
"C'est ça ! Tu te dis, 'Je sais que je l'ai dévoré !', pas vrai, Czes ?"
"...Ah... uh... aaaaaaahhhhh..."
La bouche de Czes tremblait tandis que sa respiration hachée sortait difficilement. L'homme retroussa ses lèvres dans un rictus.
"On dirait que j'avais raison. Quel soulagement. Tu n'as pas changé d'un pouce, mon petit Czes."
L'homme soupira comme s'il était sincèrement soulagé.
"Tu vois, il n'y a que moi qui te connaît vraiment, Czes."
"C-comment... comment... comment ?! Comment ?! Comment !!"
Le garçon luttait pour s'exprimer, mais l'homme l'ignora complètement.
"J'ai eu un mal fou à effectuer ce boulot ; mais ça valait largement le coup. C'est très important pour un immortel de se trouver une passion dans la vie, Czes. Si tu perds cette passion, tu vas finir par perdre ton âme avec, comme Begg."
Et sur ces mots--
L'homme qui était à la fois Life le Supplice des Mask Makers, le Demolisher qui avait amené Carnea à bord, et Viralesque, l'un des dirigeants de SAMPLE, évoqua de nouveau la 'partie de jeu' qu'il avait organisée.
"Ah, j'étais tellement, tellement heureux de te voir sur l'Entrance, Czes. J'ai même hésité à retirer mon masque et mes lunettes rien pour toi. J'avais peur que tu me demandes qui j'étais, puisque je ne peux pas employer de fausse identité devant toi ; c'est pour ça que je t'ai laissé partir à ce moment-là."
"Ah..."
L'homme en tenue de combat que Czes avait croisé dans le navire. Même en sachant qu'il s'agissait de Fermet, Czes n'arrivait pas à retrouver sa voix.
"Le meilleur quand on est immortel, tu vois, c'est qu'on peut mener toutes sortes de vies, Czes. Ahh... et si tu mènes toutes ces vies différentes, tu peux même te créer des jouets fantastiques comme Illness, Carnea, et ce brave Luchino Campanella. Je ne saurais les classer, mais... puisque tu es là, Czes, je peux bien t'avouer que tu es le plus précieux à mes yeux."
Czes restait figé sur place, et Fermet se pencha pour lui murmurer dans l'oreille.
"Heureux ? Tu peux me sourire, tu sais."
"...Non... non... tu n'es pas... tu ne peux pas être... Fermet."
Czes essayait désespérément de rejeter la réalité qui se révélait devant lui. Fermet effaça son sourire et secoua la tête.
"Ah, autant te prévenir tout de suite : je ne suis pas un clone, ni un imposteur. C'est moi le Fermet qui t'accompagnait à bord de l'Advenna Avis."
"Ah... ah."
Czes luttait pour trouver ses mots, quand Fermet finit par aborder le sujet tabou.
"Du coup, nous voilà face à un sacré mystère."
"..."
La question que Czes tentait d'ignorer de toutes ses forces.
"Si je suis bien moi... qui était-ce que tu as dévoré cette fois-là ?"
"...!!"
Czes sentit son cerveau le lâcher. Comme Fermet se tenait sur une marche inférieure, Czes réagit instinctivement et plaça sa main droite au-dessus de sa tête. Tout ce qu'il avait à faire, c'était de penser "Je veux le dévorer" et Fermet perdrait la vie. Entièrement absorbé par l'esprit de Czes. Mais--
"Autrefois, tu pouvais me dévorer, Czes."
L'homme s'exprimait avec un ton encore plus amical qu'auparavant. Mais ses paroles renfermaient le coup fatal qui allait achever Czes.
"Mais, celui que tu es devenu... tu ne peux plus me dévorer, n'est-ce pas ?"
"-----"
Czes sentait son estomac se révulser. Quand bien même c'était lui qui tenait la vie de Fermet au creux de sa main, ses pensées paralysées l'empêchaient de réagir.
Son instinct hurlait, "ne le dévore pas !". Son âme en tant qu'immortel l'avertissait que cet homme était un poison pernicieux.
"-----"
Czes restait figé sous le choc.
"J'ai raison, bien entendu."
Avec un sourire heureux, ravi, débordant de joie--
"Tu vois ? Je te l'avais bien dit. Il n'y a que moi qui te connaisse vraiment, Czes... Hahahahahahahahaha ! Hahahahahahahahahah !"
Fermet commença à rire d'une voix sonore qui le faisait presque passer pour quelqu'un d'autre. Des touristes marchant un peu plus loin tournèrent la tête dans leur direction. Ayant aperçu leurs regards préoccupés, Fermet reprit tranquillement son calme--
"Bon, on se retrouvera un de ces jous pour une autre partie, Czes."
Avec un léger sourire, il tapota la tête du garçon avec sa main droite. Le garçon n'essaya même pas de résister, malgré l'épée de Damoclès au-dessus de sa tête.
"Bien sûr, tu n'as aucune idée de la prochaine fois que je viendrai te retrouver--peut-être demain, ou dans un siècle..."
Czes ne vit même pas Fermet partir : c'est comme s'il s'était évanoui tel un mirage. Mais il savait que celui-ci reviendrait bel et bien.
"Ah ! T'es là, Czes ! Désolé ! Je n'aurais pas dû balancer le nom de ce type comme ça... Vraiment désolé. Je t'ai blessé ?"
Firo lui parlait, mais Czes n'écoutait pas. Cependant, la présence de Firo - de sa famille - lui fit réaliser la vérité ; qu'il était bien dans le monde réel, pas dans un rêve ou un cauchemar quelconque.
"Ah. Ah.... Aaaaaaaaaaaaaaahhhhhhhhhhhhh....!
"C-Czes ?!"
"WAAAAAAHHHHHHHH...! AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHHHHHHH!"
Le premier son qui s'échappa des lèvres de Czes après qu'il ait retrouvé la voix--
"AAAAAAAAAAAAAAAHHHHHHH ! WAAAAAAAAAAAHHHHHHHHH !"
Ressemblait aux cris d'un gamin perdu, pleurant pour que ses parents viennent le chercher.
<==>
Et tandis que les sanglots du garçon retentissaient dans l'air--
"Ah, quel son merveilleux. Comme c'est excitant."
Le coupable (à plus d'un titre), responsable des larmes de Czes, parcourait les rues d'un pas enthousiaste.
"Ah, j'en ai peut-être un peu trop dit. Mais bon, c'est naturel que je m'emporte en parlant à Czes pour la première fois depuis si longtemps."
Son ton était différent de celui qu'il avait adopté en parlant à Czes. Ce n'était ni la voix du Demolisher, ni celle de Life. Alors qu'il endossait sa voix véritable, celle qu'il avait soigneusement dissimulée à tous les passagers de l'Advenna Avis, l'homme s'avançait sous un soleil radieux ; comme s'il annonçait au monde entier son apparence cachée jusqu'ici.
Soudain, une sonnerie - la mélodie d'une chanson d'un groupe anglais célèbre - retentit dans sa poche.
[...Comment allez-vous Fermet ?]
La voix à l'autre bout de la ligne appartenait à un immortel, celui qui n'avait pas participé à cet incident.
"Ah, Huey ! Qu'est-ce qu'il y a ? Mécontent que j'ai emprunté ton nom sans demander la permission ?"
[...Bien sûr que non. Les actions d'un cobaye ne sont que des données expérimentales supplémentaires.]
L'homme, qui s'exprimait d'un ton parfaitement monotone, l'interrogeait juste pour satisfaire sa propre curiosité.
[Tiens, au passage... l'Élixir que vous avez donné à vos alliés--]
"Pas de souci. Je leur ai donné la formule incomplète à tous les trois. Et d'ailleurs, ce ne sont pas mes alliés. Juste des outils qui me sont utiles pour le moment."
Le jeune homme observait un Break grand modèle stationné dans le parking vers lequel il se dirigeait. Dans la voiture se trouvait l'homme-gorille et les deux secrétaires de Bride, tous trois indemnes et semblant être parvenus à s'échapper d'une façon ou d'une autre.
[Laissez-moi vous poser une question. Qu'est-ce que vous comptiez accomplir en coulant ces deux bateaux ?]
Huey Laforet lui demanda, comme s'il connaissait déjà la réponse. Et il lui répondit ; le simple criminel qui ne pouvait même pas prétendre être au titre de terroriste lui répondit avec un air d'extase absolue.
"Ah, c'est juste que... Czes avait l'air tellement heureux. Bon, j'adore les sourires, mais--"
Huey Laforet savait ; il savait que la réponse de Fermet, qui ressemblait à une simple excuse, était la vérité vraie.
"Je voulais juste revoir ses larmes une fois de plus !"
En fait, Fermet n'avait jamais essayé de cacher la vérité. Il voulait s'amuser et harceler ses 'jouets' comme Czes, Carnea et Luchino. Telle était la simple vérité. Et le jeune homme, qui avait causé tout cet incident dans cet unique but--sourit d'un air candide et leva le regard vers le ciel bleu de Kyoto.
Lebreau Fermet Viralesque.
Et aussi, l'homme qui avait été dévoré par Czes. Et aussi, l'homme qui avait été dévoré par un autre alchimiste.
L'homme qui représentait pour Czes - et les autres immortels - le plus 'mauvais' et le 'pire'--
Revint dans leur monde.
Sans peur, sans hésitation.
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